Vichy : une céramiste sur le toit des thermes

Il y a 36 ans, Colette Robin était sélectionnée pour restaurer les dômes de l’un des plus grands établissements thermaux de Vichy. Coiffés de carreaux de grès émaillés, ces Thermes des Dômes de 1903, d’inspiration byzantine et au souffle Art Nouveau, s’inscrivent dans l’architecture remarquable et éclectique de la « Reine des villes d’eaux » désormais au Patrimoine Mondiale de l’UNESCO.

Le magnifique établissement thermal le Thermes des Dômes de Vichy, doit la restauration de ces dômes à la céramiste Colette Robin. ©EB

Dans les greniers d’une maison de Beaugency qu’elle s’apprête à quitter, Colette Robin avait installé son atelier de céramiste. Dans l’un d’entre eux, sur des étagères, des restes de tessons bleus… « Voilà toute la gestation des dômes, nous explique t-elle. Les notes chimiques ont commencé ici .» Alors professeur d’arts plastiques à Pithiviers, Beaugency et Orléans (Loiret), Colette concourt pour la restauration des dômes des Thermes des Dômes de Vichy. L’édifice de 1903, qui s’étire sur 170 mètres de long, face au Parc et au fameux Hall des Sources, arbore un style néo-mauresques et Art Nouveau avec des dômes percés de claustras en grès bleu, œuvre du céramiste Alexandre Bigot.

L’enjeu : retrouver les couleurs et la texture de l’époque

L’idée ? « Refaire à l’identique les dômes latéraux des thermes et les pièces de forme ainsi que l’étanchéité », poursuit Colette Robin. La restauration du gros dôme suivra en 1998. « Ces dômes sont recouverts d’une double coupole : la coupole extérieure, en béton armé, est habillée d’une mosaïque de carreaux de grès émaillé avec des tons nuancés, allant de l’ocre au verdâtre pour le dôme principal, et du bleu et or pour les pavillons d’extrémité. » Au total, pas moins de 200 mètres carrés de carreaux pour chaque dôme et 330 mètres carrés pour la coupole. « J’ai fait des échantillons pour retrouver les émaux, les couleurs, la texture et la brillance des tessons d’origine. Cela a nécessité beaucoup d’essais car les carrières de quartz, silice, oxyde de fer, titane, colémanite… utilisées n’existent plus aujourd’hui. » À partir des biscuits réalisés, Colette trempera alors les carreaux un par un à la main dans des bassines d’émail avant de les cuire à 1300°C : 40 carreaux par mètre carré… 10 000 gestes au final ! Un travail que la céramiste évoque encore aujourd’hui avec une certaine émotion : « J’ai retrouvé toute l’intimité de la production et du processus d’émaillage de Bigot faits au début du siècle… Le geste des ouvriers de l’époque… »

De nombreux essais d’échantillons ont été nécessaires pour retreouver la couleur et la texture des émaux de l’époque. ©EB

Un projet qui marque un tournant

En feuilletant l’album photos de cette restauration, Colette Robin se rappelle aussi de quelques difficultés rencontrées sur le chantier : repérage sans échafaudage du grand dôme, recrutement de jeunes disponibles et compétents pour réaliser le deuxième dôme en deux ans, suivre le calendrier, ou encore inventer des systèmes de pose pour ne pas que de grandes pièces retombent comme la ceinture bleue à la base du grand dôme. Mais quelle aventure artistique la céramique ! « Mon premier grand projet, le plus fort, j’ai 30 ans à l’époque ! Je me confronte à des responsabilités énormes, à la difficulté, l’exigence, être de parole, faire du beau travail. Ça a été un tournant. » L’occasion pour elle de quitter l’enseignement et de s’engager dans de nombreuses autres restaurations comme le théâtre des Champs Élysées, le faîtage et les ornements de l’ancienne chocolaterie Menier à Noisiel (futur site de Nestlé France, le château de Gretz-Arminvilliers, le jardin de l’Évéché de Vierzon… « Vichy m’a lancée ! Elle m’a donné une carte de visite, et personnellement m’a construite et épanouie. »

Une touche de poésie dans vos jardins ? Les pots et jardinières de Colette, gravés de textes littéraires ou de poèmes, ajoutent un cachet à vos coins de nature. ©ColetteRobin

Spécialisée depuis quelques années maintenant dans les céramiques de jardin, Colette expose et vend grands pots et jardinières gravés de jolis textes poétiques. Des œuvres inspirantes tout droit sorties de son atelier désormais installé dans le Finistère sud, dans sa Bretagne familiale et que l’on peut admirer , lors de fêtes de plantes comme à Chantilly (60), Kerjean (29), ou encore au Prieuré d’Orsan (18)… A moins qu’une escapade vous conduise à Vichy, site UNESCO depuis le 24 juillet : à la sortie du Parc des Sources et de sa galerie-promenade Belle Époque, ayez l’œil « pétillant » sur les Thermes des Dômes !

Estelle Boutheloup

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