Délicieuse leçon de musique et de vie avec “Madame Pylinska” 

Tout débute côté cour par une petite mélodie de vie céleste qui sort d’une boite à musique près d’un écrivain à sa table. Côté jardin se tient un pianiste au clavier de son piano de concert. A son bureau, Éric-Emmanuel Schmitt, auteur et interprète va, tout près de deux heures, offrir une savoureuse fable initiatique sur la création et l’interprétation. Il y est en alternance accompagné par Nicolas Stavy et Guilhem Fabre. Proposé par le Centre national de création d’Orléans Loiret, le spectacle “Madame Pylinska et le secret de Chopin” est délicieusement écrit et habité. Voici une leçon de musique empreinte de tendresse et de passion, d’humour et d’humanité. 

Par Jean-Dominique Burtin 

Éric-Emmanuel Schmitt et Nicolas Stavy. Photo : Fabienne Rappeneau.

Passeur de sourire, de solitude et de silence 

Avec malice, une délicatesse touchante et prenante, l’auteur évoque en lever de rideau ses souvenirs d’enfance et ce « terrible intrus » de la maisonnée, ce Schiedmayer droit sur lequel sa sœur torturait La lettre à Elise. Puis, sur le plateau de la salle Touchard du Théâtre d’Orléans, dans une mise en scène de Pascal Faber, le conteur ne tarde pas à parcourir l’espace avec grâce et, parfois, une truculence véhémente et sonore.  

Au fil de la fable, l’interprète endosse à merveille différents personnages, le sien mais aussi celui de la tante Aimée, fée musicienne qui l’a ouvert à la musique, et celui de cette extravagante professeure de piano polonaise, Madame Pylinska. Elle aussi est amoureuse de Chopin, celui qui nous offrait son monde intérieur, « un ailleurs lumineux flottant en nappe », ainsi que cette « efflorescence d’un monde parallèle ». Chopin ? Il était un compositeur a cœur coureur de fond. Chopin ? Il était « l’étonné » alors que Liszt était « l’étonnant » affirme l’écrivain fuyant toute virtuosité. Chopin ? Il était un passeur de secret, de solitude et de silence. 

Petites et belles histoires d’amour 

Ici, Éric-Emmanuel Schmitt nous emporte dans un salon de musique aux « odeurs de rose et de tabac brun » où courent des chats nommés Alfred Cortot, Horowitz et Rubinstein, dans un appartement où l’araignée du plafond descend en rappel au-dessus du piano dès que s’en échappent les arpèges et la « soie des sons ». Dans le clair-obscur ou le solaire dus aux très beaux jeux de lumière de Sébastien Lanoue, celui qui se met quelques secondes au clavier pour La valse de l’adieu,  enchante chacun en  l’invitant à se laisser aller aux choses minuscules du bonheur : écouter battre son cœur et celui des uns et des autres ; cueillir au jardin du Luxembourg des fleurs en prenant soin de ne pas en renverse les gouttes de rosée ; contempler la liesse et valse des ramures sous le vent ; se promener de manière romantique à Cabourg au bras d’un être cher . Tant d’autres choses encore. Infimes éblouissements.

Au côté d’Éric-Emmanuel Schmitt se tient, ce jeudi, le pianiste Guilhem Fabre qui dialogue à l’intime avec le récit. D’une grande intensité est notamment la Première Ballade animée de pudeur et de sentiment dramatique. D’une « lassitude exquise » est encore cette Berceuse invitant à s’abandonner au partage d’une douce confidence littéraire et musicale à deux chants. Ce jeudi, à l’issue de cette précieuse performance, ovations et rappels par un public debout. 

“Madame Pylinska et le secret de Chopin”,

jusqu’au 12 décembre, Théâtre d’Orléans.

En savoir plus : www.cado-orleans.fr

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