Nous anti-gaspi : l’épicerie qui lutte contre le gaspillage alimentaire

L’enseigne, née en Bretagne en 2018 et déjà à la tête de 20 magasins, a ouvert une épicerie à Saint-Cyr-sur-Loire, en Indre-et-Loire, en août 2021, l’unique de notre région. Son directeur, Johan Gerbault, milite pour une consommation responsable et solidaire.

Par Elodie Cerqueira

Johan Gerbault, directeur du magasin Nous anti-gaspi de Saint-Cyr-sur-Loire (37), défenseur des légumes moches ! Photo Elodie Cerqueira

Il n’y a pas qu’aux Miss qu’on impose les diktats de la beauté ! Les produits alimentaires subissent eux-aussi des discriminations : trop petits, trop gros, mauvaise couleur, emballage défectueux, date limite de consommation trop proche… et c’est ainsi près de 10 millions de tonnes de nourriture qui sont jetées chaque année ! Pour endiguer ce gaspillage, Vincent Justin et Charles Lottmann ont créé l’enseigne Nous anti-gaspi afin d’offrir un étal plutôt qu’une poubelle aux produits boudés par la grande distribution. En 2018, ils ouvrent leur première épicerie à Melesse, en banlieue rennaise, aujourd’hui ils en comptent déjà 20 dont une en région Centre-Val de Loire.

L’épicerie militante a donc ouvert ses portes en août 2021, à Saint-Cyr-sur-Loire, au nord de Tours (37). À sa direction, Johan Gerbault. L’homme de 42 ans vient de la grande distribution : « Je connaissais tellement bien le métier que je ne voulais plus en entendre parler ! » Après 15 ans d’expérience, il a quitté le secteur, écœuré par la surconsommation. En octobre 2020, alors que cela fait déjà quatre ans qu’il a quitté le milieu, il découvre l’enseigne grâce à un reportage télévisé. Si lui ne réagit pas immédiatement, sa compagne, elle, y voit une opportunité unique : « Toi qui ne veux plus entendre parler de la grande distrib’, c’est ça qu’il te faut ! ». Il n’ose y croire, alors elle prend les choses en main et contact l’entreprise. « Elle a envoyé un message pour moi à la com’, via Facebook, et ils m’ont répondu ! », s’étonne-t-il encore.

Ce qui l’a séduit ? « Tout ! se réjouit Johan Gerbault. Ici, tout est basé sur l’humain, il y a beaucoup de bienveillance. Et surtout, on ne jette rien ! Les très rares invendus sont donnés à des associations, pour une distribution le jour même. Quant aux fruits et légumes trop gâtés, on les donne aux gens qui ont des animaux ou un composteur. »

Un mode de consommation plus responsable

Et tout est pensé pour amener les clients à un mode de consommation plus responsable. Un étiquetage ludique et pédagogique explique pourquoi le produit était destiné à la poubelle. Car si on sait pourquoi les fruits et légumes hors calibrage ne sont pas vendus dans la grande distribution, c’est moins évident pour un paquet de céréales ou une boîte de conserve. On apprend ainsi qu’il peut s’agir d’une étiquette mal collée, d’un surstock ou d’une nouveauté qui n’a pas rencontré le succès espéré… Quant aux produits frais, c’est la date limite de consommation, à quelques jours de son expiration, qui les mène à un destin funeste. Et pour s’assurer qu’ils ne soient pas jetés, une course contre la montre est lancée : « Si à J moins deux ou moins un, on ne les vend pas, on applique des réductions. S’ils ne se vendent pas dans la journée, nous composons des paniers Phénix et si vraiment ce n’est pas vendu, on donne aux associations », explique le directeur.

Phénix est une application qui permet aux commerçants de proposer leurs invendus à des prix très compétitifs. Il suffit de télécharger l’application sur un smartphone et de consulter les paniers du jour. « Tous les jours on fait le tour de nos dates et ce qui est à date très courte ou date du jour, on le propose en ligne à 50 %. Les clients achètent le panier sur l’appli et viennent le chercher en magasin. Et c’est la surprise, ils ne savent pas ce qu’il y a dedans, c’est le jeu ! », s’amuse Johan Gerbault. Il se félicite, après trois mois d’ouverture, d’avoir vendu 400 paniers soit « 1200 repas qui n’ont pas été jetés ».

Des valeurs écolos et solidaire

Et pour gâter un peu plus ses clients, le directeur a mis en place des rendez-vous. Le mardi c’est sushi ! Et il faut se presser « car en une heure tout est vendu ! » Le lundi, les étudiants bénéficie d’une réduction de 10% sur l’ensemble de leurs achats, une démarche solidaire qui colle aux valeurs défendues par les fondateurs de l’enseigne.

Tous ces fruits et légumes étaient destinés à la benne pour être hors des calibrages imposés par la grande distribution. Photo Elodie Cerqueira

L’épicerie propose également des produits en vrac pour limiter les emballages ainsi qu’une gamme de produits éco-responsables (pailles en inox, lingettes en tissus…). Et pour proposer des tarifs de 20 à 30% moins chers, tout en faisant tourner la boutique, on ne fait aucune dépense inutile. Le bureau du patron : une planche sur des tréteaux et un équipement informatique de seconde main ; pas de musique dans le magasin, ainsi pas de frais de Sacem ; un petit logiciel de caisse ; les vitrines pour le froid sont d’occasion ; pour le mobilier, « c’est le mari d’une animatrice du réseau qui les fabrique avec des palettes ».

Si les centrales de Rennes et de Paris s’occupent de la plus grande partie des approvisionnements, Johan Gerbault développe aussi les partenariats avec des producteurs locaux, afin de favoriser les circuits courts. Et entre petits prix et engagement, les clients y trouvent leur compte. « Je suis relativement écolo dans ma façon de vivre, nous raconte Marie, cliente fidèle qui connaissait l’enseigne et s’impatientait de l’ouverture en Touraine. Je viens deux fois par mois et je complète mes courses au marché. Outre les économies, je découvre de nouveaux produits, des choses originales. » Car ici, « on ne peut pas venir avec une liste prédéfinie, précise Johan Gerbault. J’explique aux clients que je ne sais que la veille au soir ce que je vais recevoir le lendemain à 9 heures. » Mais c’est la philosophie du lieu, un nouveau mode de consommation, avec de nouveaux codes qui font l’ADN de l’enseigne.

Et si on demande à Johan Gerbault s’il se considère comme un concurrent de la grande distribution, sa réponse est sans appel : « On ne fait pas le même métier ! »

Lire aussi : Une alternative au gaspillage alimentaire

Point sur les dates

Ne pas confondre DLC et DDM

La date limite de consommation (DLC) s’applique aux produits frais, elle doit être respectée pour éviter tout danger microbiologique. La réglementation est stricte et il est interdit de vendre un produit dont la DLC est dépassée.

La date de durabilité minimale (DDM) est quant à elle représentée par la mention « à consommer de préférence avant le » et n’a pas le même caractère impératif que la date limite de consommation. Consommer le produit (pâtes, riz, sucre, sel, farine, conserves…) après sa DDM ne constitue pas un risque pour la santé du consommateur, la denrée peut cependant perdre certaines de ses qualités gustatives et/ou nutritionnelles.

Source : Anses

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