Jean Touret, l’art-artisanal

Il aura fallu attendre plus de dix ans après sa mort pour que paraisse le premier livre qui nous donne la première vision complète de l’œuvre de Jean Touret (1916-2004). Les nombreuses illustrations du livre comme l’inventaire de ses réalisations font bien apparaître la diversité de ses œuvres et le rôle d’animateur qu’il a pu jouer.

Par Guy Basset

Directeur artistique des ateliers de Marolles, village de Beauce à proximité de Blois où il a vécu avec sa nombreuse famille de 1947 à 1963, il a su fédérer autour de lui d’autres artisans de ce village (menuisier, potier, vannier, forgeron) et donner ainsi naissance à des mobiliers et décorations d’intérieur (tables, chaises, lampes, appliques…) qui restent des références de l’art artisanal de ces années là. Jean Touret à qui s’associa à partir de 1971 son fils Sébastien traversa la Loire pour vivre ensuite aux Montils en Loir-et-Cher. Il fut enterré dans le caveau familial, dans son village natal de Lassay-les-Chateaux en Mayenne.

Photo Richard Ode

Une amitié avec le cardinal Lustiger

L’œuvre liturgique et religieuse, son amitié avec le cardinal Lustiger qui l’a fait beaucoup travaillé et l’actualité de la destruction de l’autel de Notre Dame de Paris ont un peu trop éclipsé les autres facettes de l’œuvre de Jean Touret. Pendant 50 ans (1953-2003) il n’a cessé d’être un artiste d’art sacré, attentif de peupler de représentations de personnages de l’histoire biblique, les espaces liturgiques qu’il concevait ou aménageait.

A l’origine Jean Touret voulait être peintre, et il a continué toute sa vie dans cette direction, mais il s’est aussi adonné à la sculpture, souvent de façon monumentale, que ce soit des sculptures en bois ou en métal repoussé. Bûcheron pendant sa captivité en Allemagne lors de la seconde guerre mondiale, Jean Touret a toujours conservé le sens de l’arbre, attentif à sa verticalité spirituelle, comme à la configuration de ses veines, de ses structures. Comme le signale son fils Sébastien : « Jean Touret a toujours été intéressé par la verticalité, verticalité de l’arbre, verticalité de l’homme ; la verticalité, c’est la dignité, le courage, l’homme debout, le dynamisme ». D’où ces grandes sculptures, une vingtaine qui « traduisent le mieux ses aspirations profondes » et dont certaines sont reproduites dans le livre.

Si Jean Touret a souvent exposé en Région Centre, comme en France et à l’étranger, celle-ci lui a passé commande d’une bonne variété de ses œuvres : art sacré (carmel de Molineuf, chapelle de l’évêché d’Orléans, des fraternités monastiques de Jerusalem à Magdala), sculptures monumentales dans les quartiers Bégon et Cornilettes à Blois, panneaux sculptés au lycée Augustin Thierry à Blois, statues au collège Bégon à Blois, aménagements à la préfecture de Blois sans compter les nombreuses œuvres conservées dans des collections privées.

Le témoignage de son fils ainé

Cet ouvrage comprend aussi le témoignage de son fils ainé François qui évoque quelques souvenirs émouvants ainsi que ceux de deux de ses plus proches amis, Jean-François Labic qui affirme que Jean Touret a quelque chose du prophète et de Frédéric Toussaint qui souligne son humilité et son amour profond, « respectueux des êtres et des choses » .

Solitaire dans son art, se mêlant peu au milieu artistique et culturel, resté volontairement hors circuit commercial, Jean Touret créait, ne cachant pas son admiration pour certains artistes contemporains, comme Matisse, virtuose du trait comme Touret lui-même – notamment dans ses illustrations de livres ou de couvertures de livres.

Jean Touret ne s’exprimait que peu lui-même sur ce qu’il faisait et son art. Le texte reproduit dans l’ouvrage n’en est que plus précieux. On y relève cette conclusion qui pourrait servir d’exergue à toute son œuvre, à toute sa vie : « Cette discrétion qui sert l’âme en dehors de toute convention du goût est la plus belle qualité de l’homme. »

Ce livre donne à lire un panorama complet de l’activité artistique de Jean Touret. Il est à compléter avec le film « Touret Lustiger, au miroir d’une amitié », documentaire de Grzegorz Tomczak qui retrace l’histoire d’une forte amitié entre les deux hommes et d’une collaboration féconde, sous l’inspiration de la foi.

Jean Touret, textes de Anne Bony, Axel Corty, François Touret, Paris, Éditions de l’Amateur, mai 2022.

A lire aussi: Hommage croisé à Touret et Lustiger à Blois

Photo Richard Ode

 

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