CDN d’Orléans : une Mouette d’un formidable esthétisme

Le Centre Dramatique d’Orléans a programmé en ce milieu du mois de juin, la pièce de Tchekhov, « la Mouette » écrite vers 1895 et dont la première à Saint-Pétersbourg avait été un échec cuisant pour le dramaturge russe. Le metteur en scène Cyril Teste propose, comme il en a l’habitude, une version où la vidéo occupe une place centrale, actrices et acteurs étant constamment filmés, les visages sur grand écran au centre du plateau.

Par Bernard Thinat

Artistes et cadreurs – Photo B.T.

« La Mouette » nous plonge dans le milieu artistique, théâtral et littéraire. Tchekhov entremêle d’une part les liaisons amoureuses des uns et des autres, toutes et tous écrivains ou comédiens, qu’ils soient reconnus ou en devenir, relations difficiles, celles de la vie ordinaire et non celles d’Hollywood, et d’autre part posant crûment le conflit entre théâtre conventionnel et théâtre contemporain, le premier défendu par Irina, le second par son fils Konstantin, d’où la dispute et la rupture familiale.

Cyril Teste crée en 2000 le « Collectif MxM », destiné à associer le théâtre et l’image, principalement la vidéo, en filmant les comédiens sur scène, sorte de « performance filmique » codifiée au sein d’une charte. Le résultat est à chaque fois stupéfiant. Nous l’avions découvert en 2019 avec « Festen », adapté du film éponyme de Thomas Vinterberg, au palmarès du Festival de Cannes 1998.

Cette fois avec « la Mouette », un décor à minima, un écran central fait de grands panneaux qu’on déplace au gré des envies, écran servant de cloison entre ce qui se passe à la vue du public, et ce qui se passe derrière que l’on découvre alors sur l’écran, visages en gros plans. On sait qu’il y a un lac non loin autour duquel volent des mouettes. L’une d’elles sera abattue, symbole d’après Tchekhov de la vie de Nina, jeune artiste qui ne trouvera pas l’amour et qui se perd dans les souffrances.

Cyril Teste filme (du moins ses cadreurs) en continu actrices et acteurs, qu’ils soient devant ou derrière la cloison, ce qui exige du comédien une attention de chaque seconde, tout relâchement de sa part étant immanquablement perçu par le public. Mais ce système de double perception accroît le côté émotionnel, notamment dans une des dernières scènes, quand Nina, la jeune actrice, épuisée, souffrante, rejette l’amour que lui déclare Konstantin. On atteint par ce théâtre filmé en direct, un esthétisme particulièrement fort qui enveloppe le spectateur, le prend aux tripes comme on dit, lui insuffle une émotion rare, d’autant que celle-ci va crescendo au long des quatre actes de la pièce pour atteindre son apogée à l’ultime moment avant que les lumières ne s’éteignent.

Programmé en cette période de l’année où lycéens et étudiants sont en phase d’examens, on pouvait craindre une moindre affluence. Or, c’est une salle Barrault bien remplie qui a chaleureusement applaudi l’ensemble de l’équipe, comédiens et cadreurs au final.

Programmation à venir au CDN d’Orléans :

  • Playing for it” se penche sur le tabou de la prostitution : Jeudi 23 juin à 20 h 30 et Vendredi 24 juin à 19 h 30
  • Pueblo“, une clocharde, un gitan de huit ans,  une tenancière de bar, un manutentionnaire africain, une caissière de supermarché : Mardi 28 juin à 20 h 30 et Mercredi 29 juin à 18 h 30
  • Des caravelles et des batailles“, cinq personnages vivent heureux dans un lieu reculé : Mercredi 29 juin à 20 h 30 et Jeudi 30 juin à 19 h 30

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