Tronçais : une forêt d’exception au Centre de la France

Natif du département de l’Allier et âgé de 75 ans, Alexandre Bessard cultive son attachement particulier au Pays de Tronçais à travers, entre autres activités de ce passionné d’histoire, la présidence de l’association Mémoire de Cérilly et ses environs.


Membre du comité de pilotage de Forêt d’Exception de Tronçais, il participe aux groupes de travail visant la relabellisation de cette forêt, d’une superficie de 10 500 hectares, qui sépare le sud du département du Cher du nord-ouest de l’Allier.

La forêt domaniale de Tronçais est l’un des plus beaux massifs forestiers de France, dense de 10 583 hectares. Aménagée par Colbert, ministre de Louis XIV, elle est réputée pour abriter l’une des plus belles futaies de chênes d’Europe dont certains arbres sont plusieurs fois centenaires. Colbert est à l’origine de la rénovation et du reboisement de la forêt qui ont permis de créer une réserve de bois pour les chantiers de marine. Autrefois propriété des ducs de Bourbon, Tronçais est devenue propriété de l’état sous François 1er. Les différentes actions de l’Office National des Forêts ont permis sa régénération depuis 200 ans.

La sylviculture y fait désormais l’objet d’une gestion durable et raisonnée. Tronçais compte deux réserves naturelles en plus de ses zones Natura 2000. Elle rassemble 16 communes de l’Allier (03), dont les principales sont Cérilly et Ainay-le-Château, au sein de l’intercommunalité Pays de Tronçais.

L’étang de Pirot à l’état sauvage en forêt de Tronçais Sce Wikipédia

Magcentre : Comment êtes-vous arrivé à la tête de Mémoire de Cérilly et ses environs ?

A.B. : « Née en avril 2003, l’association de 240 adhérents va célébrer ses 20 ans l’année prochaine. Henri Bodard, polytechnicien à l’origine de sa création, n’est autre que le petit-fils de Georges Bodard. Cet érudit a été commerçant de bouche avant de devenir libraire. Il a ainsi pu s’adonner pleinement à sa véritable passion : l’écriture de l’histoire locale. A sa mort, il a laissé derrière lui un fonds documentaire de plus de 7 000 documents soigneusement conservés dans sa maison de Cérilly. Elle est devenue le siège de l’association fondée par son petit-fils, Henri, pour perpétuer la mémoire locale. Et j’ai pris la suite de mon ami à son décès ».

De quelle manière participez-vous aux travaux de Forêt d’Exception ?

« En tant que membre du comité de pilotage de Forêt d’Exception, j’ai été invité aux rencontres nationales qui ont eu lieu il y a un mois, les 5 et 6 octobre 2022. Le but était de partager les expériences de la quinzaine de forêts qui a obtenu ce label. Tronçais est d’ailleurs la seule forêt du Centre à en bénéficier.
Son comité de pilotage, animé avec talent par Bertrand Dugrain, directeur de l’agence de l’Office national des forêts Berry-Bourbonnais, qui se réunit une à deux fois par an, comprend une vingtaine de personnes parmi lesquelles des représentants de l’ONF, des élus des collectivités locales, départementales et régionales et des responsables d’associations.
Notre travail va aboutir à une présentation orale le 18 novembre 2022. Octroyé à Tronçais pour cinq ans à la fin de l’année 2017, le label est renouvelable pour 5 ans supplémentaires. L’objectif est donc de démontrer que nous sommes capables de proposer des nouvelles actions et investissements pour les années à venir ».

Le visage de Tronçais a-t-il changé depuis l’obtention de ce label ?

« Il s’est fait beaucoup de choses à Tronçais depuis l’octroi du label en 2018. Plus de 1,2 million d’euros a été investi par la Communauté de communes du Pays de Tronçais notamment pour la création des sentiers Colbert II à l’entrée nord de la forêt. Il est balisé d’une dizaine de stations sur un circuit de 1,2 km racontant la genèse de la sylviculture et de l’exploitation forestière.
Cette pédagogie claire et illustrée détaille la capacité de la forêt à se régénérer sur plusieurs générations. Le sentier de l’étang de Saint-Bonnet adapté aux personnes à mobilité réduite et long de 5 km a aussi vu le jour. Un autre sentier a été créé autour de l’étang de Pirot. Plusieurs arbres Remarquables ont bénéficié d’aménagements afin de protéger leurs racines du piétinement des visiteurs ». 

Le public est-il au rendez-vous ?

« La forêt a bénéficié de donations d’entreprises privées parce qu’elle offre un bois exceptionnel que les mécènes tiennent à valoriser et à préserver. Taransaud, via sa filiale Chêne Bois qui produit le merrain, est l’un des mécènes du sentier Colbert II. Tonnellier, il fournit de prestigieux clients comme les grands noms du cognac ou de grands crus de Bordeaux.
Des éco-compteurs ont été posés fin 2020 pour mesurer les passages à différents endroits de la forêt. Pas loin de 100 000 visiteurs ont été recensés en 2021. C’est un chiffre très significatif, relayé à Verdun lors d’une intervention consacrée au tourisme, qui a étonné l’assistance ».

 

Comment votre association s’implique-t-elle dans la future labellisation ?

« Le label est avant tout un gage de partenariat avec l’Office national des forêts. Il est la traduction d’un dynamisme. Mémoire de Cérilly et ses environs planche sur l’histoire et la mémoire pour la future relabellisation. Nous portons un projet original sur le Centre France : la création d’un itinéraire mémoriel départemental dans l’Allier. Il s’agit de rappeler les combats de la Résistance dans une boucle de plusieurs dizaines de kilomètres qui va faire le tour du département.
Parmi les étapes prévues, l’une se situe à l’entrée de forêt de Tronçais dont le parcours représentera déjà 30 kilomètres. Un petit groupe de 10 personnes issues du conseil départemental, de l’office national des anciens combattants, de l’association nationale des anciens combattants de la résistance, du Souvenir français et du musée de la Résistance de Moulins y travaille. Nous espérons être opérationnels en 2023. Des histoires vont prendre corps, être écrites ou réécrites, et nous allons essayer de travailler avec des QR codes ».

Quel est votre prochain objectif ?

« Un autre travail va se concrétiser dans le courant du mois de novembre. Depuis les années 1870-1880, les agents forestiers tiennent des livrets qui ont l’aspect de cahiers d’écolier d’autrefois. Chaque brigadier et garde avait l’habitude de rendre compte de ses activités de la journée dans ces cahiers. On y retrouve des éléments historiques importants. Cela nous est apparu pendant la première exposition réalisée en partenariat avec la mairie de Cérilly et l’ONF en 2015.
Notre prochain rendez-vous est la signature d’une convention de partenariat avec l’ONF qui nous permettra de numériser les livrets qui en valent la peine afin d’en conserver une trace numérique. Ce travail de deux ans aboutira d’ici quelques jours ».

Propos recueillis par Alexandra ADAM

Plus d’infos autrement sur Magcentre : L’Assemblée encadre l’engrillagement des forêts 

La futaie de Colbert sce Wikipedia

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