Le Président de la CRSA: “Il faut associer les territoires à l’organisation du système de santé”

Directeur du centre hospitalier de Blois, Olivier Servaire-Lorenzet préside la Conférence Régionale de Santé et de l’Autonomie (CRSA) depuis 14 mois. En exclusivité pour Magcentre, il revient sur les priorités d’actions de l’institution.

Propos recueillis par Jean-Luc Vezon

Olivier Servaire-Lorenzet veut donner plus de visibilité médiatique à la CRSA. © Jean-Luc Vezon.


Magcentre. Quel est le bilan de cette première année ?

Olivier Servaire-Lorenzet. Beaucoup de travail a été réalisé. Nous avons réuni un séminaire régional pour établir la feuille de route de notre instance de démocratie sanitaire. 80 participants, membres de la commission plénière de la CRSA, y ont pris part dans une logique d’échange et de “penser ensemble”. Trois maîtres-mots sous-tendent nos actions : fédérer les acteurs, transformer pour changer le quotidien des usagers et des professionnels de santé et innover en proposant des solutions de terrain basées sur la coopération et non imposées depuis Paris. Il faut associer les territoires à l’organisation du système de santé. Cette feuille de route sera accessible sur notre site en 2023.


Magcentre. Quels sont vos priorités ?

Olivier Servaire-Lorenzet. Sept axes stratégiques ont été définis : promouvoir le « bien-être mental » de la population, améliorer les parcours de santé pour les patients atteints de cancer, favoriser l’accès aux droits des personnes en situation de handicap, permettre aux usagers du secteur social et médico-social de bénéficier d’accompagnements bientraitants, développer la formation et l’attractivité des métiers de la santé, développer l’offre de santé pour les personnes souffrant de Troubles du Neuro-développement (TND) et du spectre de l’autisme (TSA) et promouvoir les patients “partenaires”. Tous ces sujets sont travaillés dans une logique de construction avec l’ARS et un premier bilan a été effectué lors de notre assemblée générale du 15 novembre dernier.

Magcentre. Quelle est position sur la question des étudiants en médecine ?

Olivier Servaire-Lorenzet. Dans le prolongement de notre avis de mai 2022 qui demandait un électrochoc, un groupe de travail étudie cette question et rendra un avis en 2023. Je veux cependant alerter, 300 étudiants ça ne me semble pas un nombre suffisant. 500 seraient sans doute plus adaptés. Nous allons analyser les déterminants de ce quota, proposer des pistes pour les modalités de sélection, l’organisation technique et les moyens humains de ces formations. Nous débattrons également de la question de la liberté d’installation. Les avis sur le sujet sont très partagés.

Magcentre. Vous avez d’ores et déjà des propositions ?

Olivier Servaire-Lorenzet. En effet, nous les avons exprimées le 15 décembre dernier lors du débat de notre AG extraordinaire dédiée au Conseil National de la Refondation Santé en région CVL. Nous demandons la suppression du numerus apertus décidé nationalement. Le volume d’étudiants doit être décidé régionalement dans le cadre d’une GPEC. Il en va de même pour les professions paramédicales. Nous demandons une vraie réforme qui doit toucher également Parcours Sup. Les étudiants de la région doivent être priorisés et accéder à un entretien oral pour évaluer leurs motivations.

Magcentre. Face à la dégradation des urgences, quelle est votre position ?

Olivier Servaire-Lorenzet. Les professionnels de santé sont épuisés et les usagers pâtissent du manque de personnels. Nous demandons donc à l’Etat d’engager rapidement les changements structurels pour la continuité des soins : renforcer les SAMU – centre 15, améliorer la régulation libérale, développer les pratiques avancées et augmenter le nombre d’étudiants formés car il y a trop de postes vacants. Ces questions doivent être au centre du Plan Régional de Santé 3.

Magcentre. Quid de la permanence des soins ?

Olivier Servaire-Lorenzet. Nous rendrons un avis sur le sujet. Notre position est, d’une part de responsabiliser tous les acteurs (usagers, médecins de ville et établissements de santé) et de rendre obligatoire, sur chaque territoire la coopération. Une meilleure rémunération doit également être recherchée. Dans ce domaine, il faut aussi plus de déconcentration et de décentralisation des décisions en associant les collectivités.

Magcentre. La maltraitance généralisée au sein du groupe privé Orpea vous a-t-elle choquée ?

Olivier Servaire-Lorenzet. Oui, absolument. La prise en charge de nos aînés exige plus de moyens humains et financiers. Nous souhaitons aussi que les rations d’encadrement soient opposables dans le privé comme dans le public. Certaines fédérations demandent par exemple un agent par résident en moyenne. Nous rendrons également un avis sur le sujet.

Magcentre. Après la crise sanitaire, la question du financement de la santé se pose avec acuité…

Olivier Servaire-Lorenzet. Vous avez raison, notre instance est d’ailleurs inquiète du financement du surcoût du Ségur de la Santé. Qui va payer ? Nos structures sont endettées. J’ajoute que certains secteurs comme le médico-social, ne sont pas concernées. C’est un point de vigilance.

Magcentre. Outre ce qui a été évoqué, quels seront les chantiers pour 2023 ?

Olivier Servaire-Lorenzet. Nous allons lancer une étude sur les patients “partenaires” qui sera coordonnée par Dominique Beauchamps, vice présidente de la CRSA en charge de la commission usagers. L’idée est d’être une région pilote. Nous souhaitons également créer une conférence inter institutions sur la question du handicap avec Pascal Usseglio, directeur régional des APF et Aude Brad, qui préside la commission pour la prise en charge et l’accompagnement médico-social. De même, un comité régional des TND-TSA devrait voir le jour sous l’impulsion de Martine Vandermeersch, présidente de la CTS 28. Nous rendrons également des avis sur les Plans régionaux Santé 3 2023-2028 et 4 (environnement). Nous souhaitons dans ce domaine travailler en collaboration avec le CESER CVL.

Magcentre. La CRSA, qui n’a pas de personnalité morale, reste peu connue…

Olivier Servaire-Lorenzet. Le CRSA souhaite rendre son action plus visible et plus lisible. Nous allons mettre en place une communication adaptée favorisant le débat, le contradictoire et en redonnant la parole à nos concitoyens. Des débats publics, conférences et consultations citoyennes seront organisées, par exemple, sur la liberté d’installation. Des états généraux de la santé mentale sont ainsi prévus en 2023 et, le 28 février, un débat sur la fin de vie aura lieu à Blois en présence du Professeur Régis Aubry, rapporteur du comité national d’éthique. Le CRSA disposera enfin de son propre site Internet.

Le CRSA souhaite que des solutions soient trouvées au plus vite pour sortir de la saturation des urgences. © Jean-Luc Vezon.

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