Théâtre d’Orléans : le skate sur un plateau ?

La Scène nationale d’Orléans a invité Mette Ingvartsen et son Skate Park. Un vrai skate park sur scène, avec des vrais skateurs. Comme dans la rue, le ballet des jeunes qui glissent sur leur planche étonne un peu, lasse très vite. Seule la toute fin transforme le skate park en décor et les évolutions en spectacle.

Par Bernard Cassat


On y est. Sur la scène Touchard, un vrai skate park avec ses creux et ses bosses, ses arrondis lisses faits pour glisser. Et comme en extérieur, des jeunes qui se lancent sur les pentes, qui foncent, sautent, se croisent, s’évitent, se bloquent en équilibre tout au bord de la pente et se lâchent dans la vitesse. Avec les bruits qui accompagnent ces jeux, les planches qui volent, les gestes de tout skateur qui se respecte, ce petit mouvement du pied pour faire dresser la planche et l’attraper à la main l’air de rien, ces poings qui se touchent lorsqu’il y a rencontre malencontreuse. On y est vraiment. Sauf qu’on est assis dans un théâtre et que le skate park est sur le plateau. Alors on regarde évoluer ces jeunes, mais au bout de peu, ça devient long, parce qu’il ne se passe rien d’autre.

Photo Bea Borgers


Certes il y a la musique, jouée par des musiciens sur scène, sur la piste de skate. Musique répétitive, hypnotique pour les skateurs, musique de danse un peu agaçante quand on est assis sans bouger. En tous cas pas assez originale pour exister en soi et emmener ailleurs. Certes il y a des sortes de figures, des groupes qui tournent ensemble, qui se défont puis se reforment. Avec ceux plus sûrs d’eux sur leur planche, dans un style
quasi-personnel. Ou ceux qui tombent, se rattrapent et repartent. Certes il y a les prouesses, cette fille en rollers qui marche sur les mains, et son copain aussi, qui se laisse glisser comme un phoque dans le creux de la pente. Ou ces trois filles qui tournent en chantant dans une sorte de cérémonie, de célébration de la glisse. Certes il y a des masques, mais on se demande ce qu’ils peuvent bien faire là, on ne trouve pas…

Car on est assis dans un théâtre, on attend donc que quelque chose ressemblant à un spectacle se passe. De danse, puisqu’il est annoncé ainsi. Évidemment, lorsqu’une dizaine de jeunes glissent sur une planche avec de la vitesse et de l’énergie, un ballet se crée, un mouvement, un jeu, des échanges. Mais est-ce que ça crée de la danse ? Est ce que ces quelques gestes spécifiques des skateurs prennent un sens théâtral, passent la rampe, apportent une réflexion (même visuelle) ?

Photo Bea Borgers


Il faut attendre le dernier quart d’heure pour que le spectacle commence, que se déroule sur la “scène-park” un moment de danse. Qui n’arrive jamais dans les vrais parks. Les petits lutins de nuit investissent ce qui devient un décor, avec chacun leur lumière frontale, et là il se passe quelque chose, parce que soudain il y a un regard de créateur sur les jeunes qui deviennent acteurs. Un feu de camp façons skateur, une cérémonie où les échanges prennent spectaculairement du sens. Qui débouche, lorsque le jour réapparaît, sur un mouvement de troupe. Sans skate, d’ailleurs, à ce moment-là. Un groupe de danseurs dont les évolutions, les rythmes, les déplacements apportent – enfin – de l’émotion.

Une fausse bonne idée?

L’idée de départ de Skate Park était sans doute une fausse bonne idée. Bien sûr il y a la prouesse de construire un skate park sur scène. Inviter des skateurs du lieu continuait la démarche. Mais autour des vrais skate parks, il n’y a pas de sièges pour les spectateurs. Le théâtre comme la danse ne peut être documentaire à ce point, il faut une raison, il faut un contenu. Autre que le côté spectaculaire des skateurs sur une piste. Les circassiens le savent, eux qui construisent leurs numéros avec des crescendos et des paillettes. Dans Skate Park, on ne vibre pas. Les tics des jeunes deviennent ennuyeux, ce qu’on ressent aussi dans la rue, quand de vrais skateurs répètent inlassablement une figure qu’ils loupent à chaque fois dans un bruit d’enfer. Mette Ingvartsen ne nous emmène nulle part. Dommage, la fin prouvait que ça aurait pu…

Plus d’infos autrement sur Magcentre : L’avenir du Théâtre d’Orléans et de ses différentes entités encore flou…

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