Billet : Il faut protéger notre démocratie représentative !

« La démocratie s’arrête là où commence l’intérêt de l’État »  Charles Pasqua 

Abraham Lincoln a défini la démocratie comme « le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». C’est une démocratie représentative qui organise notre politique nationale car le peuple français élit des représentants pour prendre les décisions et gouverner en son nom. Mais est-ce encore une authentique démocratie ?

Par Jean-Paul Briand

Abraham Lincoln

Seul un régime où les lois sont débattues et votées directement par l’assemblée de tous les citoyens peut être qualifié de démocratie véritable. Ce qui n’est possible que dans de très petites communautés. La démocratie définit par Lincoln est une illusion, un mythe.

La démocratie représentative s’apparente à un procédé aristocratique

Dans la plupart des grandes démocraties modernes, le peuple reste sous la domination d’un pouvoir détenu par une classe élitaire politique et administrative. Avec notre système institutionnel, les Français délèguent leurs choix à des intermédiaires sortis des urnes. Les décisions des élus ne reflètent pas nécessairement la volonté du peuple.
Il apparaît constamment une asymétrie en défaveur des citoyens qui ne peuvent contrôler efficacement en temps réel les actions de leurs représentants.

Bien que l’élite politique et administrative ne soit pas héréditaire, notre démocratie représentative s’apparente plutôt à un procédé aristocratique puisqu’elle réserve le pouvoir à « quelques-uns ». Dans son antidictionnaire Georges Elgozy considérait d’ailleurs « l’élite » comme « succédané de l’aristocratie en régime démocratique ».

La nouvelle loi sur les retraites illustre cette dénaturation. Il n’a pas été tenu compte de l’avis de nombreux électeurs contestant majoritairement la réforme. En monarque éclairé, Emmanuel Macron a jugé que les citoyens étaient insuffisamment informés et sensés. Il a considéré que sa fonction lui donnait un droit naturel à déterminer ce qui était bon pour la nation. Le processus de débat public et l’adhésion populaire, logiquement nécessaires afin de posséder une légitimité démocratique, ont été exclus par sa décision d’utiliser l’article 49-3 de la Constitution. Cette procédure critiquable est légalement permise par nos institutions car « la démocratie, c’est aussi le droit institutionnel de dire des bêtises », avait prédit François Mitterrand.

Le peuple est un agrégat hétérogène

Le terme de « peuple » a toujours eu une charge symbolique importante. Ce concept imprécis désigne un ensemble d’individus vivant sur un même territoire, ayant théoriquement une destinée et des intérêts communs. Si on lui reconnaît une existence et une expertise, le peuple devrait être en mesure de revendiquer la souveraineté, avoir le droit à décider de son propre destin et le pouvoir de transformer la société selon ses aspirations et ses besoins. Ce n’est pas la réalité. Le peuple est un agrégat hétérogène de personnes qui ont isolément des objectifs divers, contrastés, souvent concurrentiels. Des individus tributaires de leur génération, de leur éducation, de leur classe sociale, de leur histoire personnelle constituent ce peuple à qui Victor Hugo déniait toute compétence : « Le peuple ? Un âne qui se cabre ! » Et il ajoutait : « Quand le peuple sera intelligent, alors seulement le peuple sera souverain ».

« Une démocratie doit être une fraternité »

La démocratie est un mythe officiel et le peuple une abstraction. Après l’échec historique des régimes socialistes, la démocratie représentative semble le moins mauvais des modèles politiques. Il faut néanmoins la nourrir constamment en améliorant les relations que les citoyens entretiennent avec le pouvoir. Les gouvernants actuels devaient s’inspirer du conseil d’Antoine de Saint-Exupéry dans ses « Écrits de guerre » : « Une démocratie doit être une fraternité ». Sinon, « le peuple » se définit en opposition à la classe dirigeante, aux élites économiques, politiques ou intellectuelles perçues comme une caste de privilégiés acoquinés pour empêcher tous changements sociaux. La démocratie est alors en danger avec deux issues possibles : l’affrontement destructeur ou une indifférence servile. L’une et l’autre s’ouvrent constamment vers le même totalitarisme délétère des états policiers…


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Commentaires

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  1. Pasqua, ancien membre du SAC aurait pu rajouter : <>
    Le SAC a été dissout en 1982 par François Mitterrand, voici la déclaration de Jacques Attali concernant cette organisation :
    ” L’action de cette organisation est fondée sur la violence et sur des pratiques voisines du banditisme, comme en témoignent les nombreuses affaires judiciaires dans lesquelles certains de ses membres et de ses dirigeants ont été et sont impliqués.”

  2. Pasqua, ancien membre du SAC aurait pu rajouter :
    ” l’État c’est moi ! “

  3. (à Pirate) : Ce n’est pas honnête d’attribuer vos propres paroles à Pasqua et de faire un amalgame avec les événements actuels.

    à (J.P.Briand) : On pourrait aussi répondre M. Briand que la réforme des retraites était annoncée dans le programme de M. Macron et que de très nombreux joueurs de casseroles actuels se sont abstenus aux dernières élections présidentielles . S’ils n’étaient pas d’accord avec ce programme, ils avaient, au premier tour, quatre choix de gauche possibles tous membres actuels de la Nupes. Mais c’est sans doute fatigant d’aller jusqu’au bureau de vote.

    Les divisions des quatre candidats soit disant unis sous cet acronyme n’ont pas constitué une majorité au second tour . On peut donc penser que ceux qui ont mis la démocratie en danger ce sont les abstentionnistes . Les élections se sont déroulées régulièrement non …? A partir de la on doit respecter l’issue des élections Non ? Prétendre ensuite que l’on représente le peuple n’est pas légitime . Quant on s’abstient, on laisse passer son tour … jusqu’au prochaines élections.

  4. « La République a besoin d’être défendue » écrivait Jean Zay dans « La France du Centre », en 1935
    Il y commentait le vote à une très faible majorité de l’Assemblée nationale du rapport Chauvin, sur les événements du 4 février 1934. Ce rapport était combattu par Pierre Laval, soutien indéfectible des anti-républicains, le Colonel de la Rocque et ses amis monarchistes de l’Action. Ces derniers continuaient en effet d’organiser en province des manifestations contre la République, mobilisant militaires et personnalités politiques locales : « Il est de plus en plus dangereux – écrit Jean Zay – qu’on laisse s’organiser et s’armer impunément des formations de guerre civile, qui n’ont pas d’autre raison que de peser sur la souveraineté nationale et de briser, le cas échéant, le suffrage universel tel qu’il vient de s’exprimer librement, il y a quelques semaines. Les agitateurs professionnels, qui entrainent parfois de braves gens abusés, devraient comprendre qu’ils jouent un jeu dangereux. Mais qu’attendent les hommes d’ordre et de paix, qui veulent éviter les conflits des rues, pour se joindre à nous et réclamer le désarmement des factieux, pendant qu’il en est temps encore d’éviter aux citoyens la tentation de se substituer à un État défaillant. »
    Et face à un État défaillant, c’est généralement la droite la plus extrême qui rafle la mise : Napoléon III, Mac Mahon, Pétain, Laval, …

  5. Tout cela est très intéressant, mais j’ai un peu de mal à comprendre la relation immédiate aux événements que nous vivons aujourd’hui . L’histoire ne se répète pas ; il faudrait un commentaire plus éclairant. Ce que je constate : chaque “manifestation” soit disant d’importance nationale des casseroleurs, est accompagné de casseurs (ou précède en intention) les manifestants : ces casseurs cagoules en sont les “poissons pilotes”. Si la Nupes et sa courroie de transmission ne veulent pas s’associer à ces casseurs, une seule solution choisir une autre voie. Sinon ils sont complices . L’autre voie : participer aux élections au lieu de s’abstenir.

  6. 1 – il faut se demander pourquoi les électeurs s’abstiennent
    2 – tous les abstentionnistes ne sont pas NUPES ou de gauche
    3 – c’est toujours le même discours : “vous n’avez qu’à voter au lieu de manifester”. Voter alors que le vote se résume dans tous les cas à voter “contre” un candidat au second tour ?
    4 – ça vous arrangerait bien que la participation soit plus élevée, histoire de légitimer un tant soit peu le candidat du grand capital. Et bien non.
    5 – Votre âge et votre position sociale ?

  7. à Jacquou le Croqué :
    1 : quel est votre réponse à votre question ?(plusieurs réponses possibles… En Suisse, le fait de s’abstenir est puni d’une amende …je trouve cela bien)
    2 : d’accord mais une grande proportion
    3 : Ce n’est pas exact ; si je suis d’accord pour penser que le candidat idéal n’existe pas, on peut réfléchir et choisir le moins mauvais pour les circonstances difficiles (guerre, inflation, pandémie, réchauffement climatique, politique démographique, organisation pérenne des retraites et mode de financement etc)
    4 : que cela m’arrange ou non a assez peu d’importance.
    5 : et en plus vous faîtes de la ségrégation sur l’âge, sur la position sociale . Pourquoi pas sur le sexe ou sur le fait d’être en couple ou non, sur le fait d’être LGBT , ou le fait que l’on aime ou pas le foot, le tennis, le golf, la voile ou la pèche à la ligne, pendant que vous y êtes ?

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