Teknival dans l’Indre : vive la liberté !

Ils ont débarqué à 30 000 sans rien demander à personne. L’Etat est intervenu pour limiter la casse. L’agriculteur dont la friche sera difficile à labourer ne leur en veut pas. Seules les vipères n’ont pas joué le jeu. Mais tout s’est à peu près bien passé.

Par Pierre Belsoeur


Alexis Rousseau-Jouhennet a été le premier à s’indigner sur les ondes. Tout juste rentré de Saint-Hélène (1) où il était allé célébrer Napoléon – qui ne s’embarrassait pas de permissions pour faire traverser des pays entiers à ses hommes – le président de la communauté de communes de Levroux volait à la défense de Villegongis envahie par plusieurs dizaines de milliers de teufeurs, venus fêter l’Ascension ou plus exactement les trente ans du Teknival en Berry. Directeur de la communication de Châteauroux Métropole et de l’Office de Tourisme, il aurait dû se réjouir de l’installation dans l’Indre d’un évènement qui n’avait pas coûté un sou de promo et dont tous les médias télé, radio, presse écrite allaient se faire l’écho. Trente mille jeunes aimantés par la musique techno vers l’Indre, un rêve éveillé pour l’agence d’attractivité départementale !

Le préfet de l’Indre tenait un point presse chaque jour à 16h30. Photo PB

« On ne peut pas expulser 10 000 personnes »

Évidemment, si l’on examine la colonne des points négatifs, on peut admettre que le terrain de Dominique Paillault, l’agriculteur qui a eu lui aussi les honneurs de médias nationaux, ne bénéficiait pas d’une desserte vraiment adaptée au trafic de cette Ascension 2023. Sans doute les 270 gendarmes (trois escadrons de gendarmerie mobile, les PSIG voisins et quatre brigades cynophiles) auraient-ils préféré être ailleurs, de même que les équipes médicales du Samu et les pompiers. Ajoutons que le déroulement d’un Teknival s’accompagne toujours de consommation de drogues plus ou moins violentes.

Mais depuis trente ans les organisateurs de ces grandes messes de la techno (qui restent pour le moins discrets sur le mode de financement de leur manifestation) jouent au chat et à la souris avec les pouvoirs publics et gagnent à chaque fois. « On ne peut pas prendre le risque d’expulser 10 000 personnes », avoue Stéphane Bredin, préfet de l’Indre pour qui la mairie de Villegongis n’aura plus de secret puisqu’il vient d’y tenir quatre points presse en quatre jours. Un préfet qui explique que quinze départements étaient sous la menace du 30e Teknival et qu’il était impossible de quadriller tout le territoire. Nos campagnes sont vides et les déplacements suspects qui étaient par le passé signalés aux gendarmes, passent désormais inaperçus. Car les 70 ha de Dominique, il a fallu tout de même les repérer précisément, y passer aussi quelques jours avant l’évènement pour cacher la drogue (les fouilles opérées tout au long du festival n’ont permis que des saisies minimales par rapport aux besoins des teufeurs pendant quatre jours). 
Alors, face au débarquement imprévu, les pouvoirs publics ont fait contre mauvaise fortune bon cœur :
 aménageant à minima le site pour des questions d’hygiène, réquisitionnant des palettes d’eau de source pour désaltérer les danseurs…

Les vipères détestent la techno

La seule chose que les repérages n’avaient pas permis d’identifier, c’étaient les vipères, réveillées par le vacarme et les piétinements. Philippe le médecin des pompiers, et Amal, du SAMU 36 avaient déjà pris en charge vendredi un festivalier qu’ils avaient fait transférer à Tours et s’attendaient à d’autres accidents de ce genre. Deux vieux briscards des Teknival qui avaient déjà à leur actif celui de Chavannes dans le Cher (80 000 teufeurs en 2006) et Salbris (30 000 en 2016) et envisageaient les choses positivement. « Ce ne sont pas des mauvais bougres, ils viennent pour faire la fête, mais certains forcent sur les produits et c’est là qu’il faut être vigilant aux cocktails explosifs ». 

Atmosphère relax vendredi après-midi au centre d’accueil. Photo PB

Le dispositif mis en place a bien fonctionné (30 personnes hospitalisées à Châteauroux ou à Tours), les jeunes ont été prudents et la fête interdite s’est déroulée dans le respect de l’esprit « free party ». La France et singulièrement le Berry restent donc le pays de la Liberté. 

Photo de Une : Teknival à Salbris en 2016


Plus d’infos autrement sur Magcentre : Teknival à Salbris : la fête est finie

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