Pas de rassemblement évangélique à Nevoy en août, Elisabeth Borne soulage les élus

La nouvelle est tombée lundi soir. Élisabeth Borne a répondu par sms aux élus qui l’avaient interpellée sur le sujet : le rassemblement Vie et Lumière prévu fin août n’aura pas lieu à Nevoy (Loiret), mais à Grostenquin (Moselle), sur un terrain militaire désaffecté. Élus et riverains sont soulagés, mais ne veulent plus être confrontés à la surpopulation du mois de mai 2023.

Par Izabel Tognarelli


La religion relie ceux qui partagent la même foi.
 Mais il arrive tout aussi souvent qu’elle divise. C’est un peu ce qui arrive à Nevoy, petite commune située à l’extrémité sud-est du Loiret, tout près de l’Yonne et du Cher. Depuis 1987, les pèlerins de Vie et Lumière – Mission évangélique des Tziganes de France – investit chaque année la petite commune pour un rassemblement au cours duquel ont lieu notamment des baptêmes. Au fil du temps, les habitants de ce village d’un peu moins de 1 200 habitants se sont (plus ou moins) habitués à voir arriver environ 20 000 personnes pour cet événement. Mais au mois de mai 2023, le nombre de pèlerins a bondi au-delà des 38 000, engendrant tensions et débordements. Car le terrain de 130 hectares, propriété de l’association, n’a pas suffi pour contenir le nombre de caravanes, estimé à 8 000. La perspective d’être confrontés à la même situation à la fin du mois d’août a engendré beaucoup d’appréhension, avec la crainte de l’accident, de l’irréparable dû à la surpopulation sur un espace aussi concentré.

Trois élus locaux soudés face à l’adversité – Photo Izabel Tognarelli

Des infrastructures non adaptées à une telle affluence

Trois élus ont fait front ensemble à la situation : Jean-François Darmois, maire de Nevoy, épaulé par Francis Cammal (maire de Gien et président de la Communauté des Communes Giennoises) ainsi que Marc Gaudet, président du Conseil départemental du Loiret. Tout trois, à commencer par Francis Cammal, invitent à ne pas oublier la dimension de sécurité. « Nous ne stigmatisons pas la communauté des gens du voyage, nous n’avons rien contre eux. Nous les connaissons bien. Cela s’est toujours bien passé jusqu’à ce qu’on ait, en mai dernier, des effectifs dépassant les 38 000 pèlerins. Ce n’est pas supportable pour des raisons de sécurité, d’hygiène, de salubrité publique. Mais la communauté est la bienvenue sur notre territoire dès lors que cela se passe dans des proportions raisonnables ».

En tant que président du Conseil départemental, Marc Gaudet est sur la même longueur d’onde : « Je confirme qu’il n’est pas question de stigmatiser une population qui a un mode de vie différent du nôtre. Pour moi, président du département, j’y vois la sécurité du point de vue de l’utilisation des routes, qui est une compétence départementale : une telle affluence de véhicules sur une zone réduite engendre des encombrements. Il faut toute une organisation autour de ce rassemblement ». Jean-François Darmois rappelle qu’en mai, il fallait parfois 1h20 pour relier le rond-point nord de Gien à celui de Nevoy, distant d’une poignée de kilomètres. Francis Cammal ajoute : « Le nombre de pèlerins est passé du simple au double, alors que nos infrastructures n’ont pas évolué dans la même proportion. La situation se tend ». Tous craignent l’accident irréparable, dû à l’exaspération.

Le danger de l’incendie

Si jusqu’ici les tensions entre riverains et pèlerins ont pu être contenues, Marc Gaudet, par ailleurs président du SDIS, voit aussi d’autres dangers menacer un rassemblement d’une telle ampleur sur cette période de l’année : « J’avais une grosse crainte pour un rassemblement en plein été, période où la végétation peut être extrêmement sèche. Quand on voit comment une étincelle peut générer un incident catastrophique, je me demande qui prendrait la responsabilité si cela arrivait. Peut-être l’association, mais ce n’est ni au maire de Nevoy ni à celui de Gien de porter une telle responsabilité ». Or en mai dernier, faute de place sur la parcelle dont l’association est propriétaire, des pèlerins s’étaient installés sur des terrains privés et avaient installé des rallonges. « On a eu des vols d’électricité sur le réseau public par les personnes en marge du camp, raconte Jean-François Darmois, on a vu une rallonge prendre feu. Ce danger persiste car les installations ont été détériorées : tout le monde peut y toucher et s’électrocuter ». Marc Gaudet enchaîne : « Nous avons eu beaucoup de chance jusqu’à aujourd’hui. C’est tant mieux. Mais à un moment, il va nous falloir exiger une sécurité incendie sur ce terrain avec des réserves conséquentes et que chacun ait des obligations. Pour moi, un rassemblement au mois d’août à Nevoy présentait clairement un risque ». Or un risque sur autant de personnes rassemblées poserait des problèmes vis à vis de l’hôpital de Gien.

Le point noir de la salubrité

L’hygiène constitue un point de crispation sur lequel les habitants présents à ce point presse sont clairement à cran. Jean-François Darmois s’exprime sur cette question : 
« Ce problème déborde sur DampierreGien et d’autres communes environnantes, qui se retrouvent avec des toilettes à ciel ouvert, sur le domaine public, dans les propriétés privées, dans les installations publiques :
 les photos ne peuvent rendre compte de ce que nous vivons. Et ça, c’est très dur, c’est incompréhensible. Comment peut-on en arriver là ? ». Francis Cammal poursuit : « Il faut dire les choses, mais il faut aussi les vivre pour s’en rendre vraiment compte. Peut-être les nouvelles générations ont d’autres habitudes, mais on a beau mettre autant de sanitaires que nécessaire, il y aura toujours des personnes pour aller dans la nature car c’est leur mode de vie : quand on pose la question au pasteur Joseph Charpentier, il nous le dit très clairement ».

Les organisateurs de ce rassemblement étaient absents de cette réunion, mais les élus présents insistent sur le fait que la discussion n’est pas rompue et que les responsables de l’association sont satisfaits de la solution trouvée. Par ailleurs, lors de la réunion de retour d’expérience à la préfecture du Loiret, les organisateurs de ce rassemblement avaient dit qu’ils ne pouvaient pas garantir que 40 000 pèlerins soient l’effectif maximum accueilli à Nevoy. « Comment refuser à des croyants de venir aux réunions de prière, de venir louer Dieu ? » Tel est leur argument.

Le rassemblement de Nevoy attire une population exponentielle, qui dépasse désormais l’Hexagone grâce notamment aux réseaux sociaux. Les élus demandent une prise de conscience de la part de l’État afin qu’il y ait un cadre, pour ne pas être confrontés à une dérive. Ils ont rappelé à Élisabeth Borne l’engagement pris il y a une dizaine d’années par Manuel Valls, alors Premier ministre : l’Etat s’était engagé sur un seul rassemblement par an à Nevoy, engagement tombé en désuétude. Les élus locaux attendent que l’engagement de l’Etat s’inscrive dans la durée et que le second rassemblement annuel ait lieu ailleurs que dans le Giennois. Ils sont d’accord pour un rassemblement à Nevoy, mais pas dans les conditions de mai dernier.

Un chapiteau encore plus grand

La nouvelle de l’installation imminente d’un chapiteau encore plus grand fait le tour de la Toile. Sur YouTube, l’association annonce que ce chapiteau fera 120 mètres sur 60 (contre 90×40 pour le chapiteau actuel) pour une superficie de 7 200 m². Les élus craignent l’effet d’attraction de ce nouveau chapiteau, financé par l’ensemble de la communauté et présenté par l’association comme un monument. Il est fabriqué en Italie par une entreprise spécialisée dans ces grandes structures. Les mâts culmineront à 17 mètres de haut. D’autres chapiteaux, de moindre ampleur, sont destinés aux jeunes gens (40 mètres sur 25), ainsi qu’à la librairie de l’association religieuse et encore un autre pour la vente de CD.

 

@ Info Chrétienne

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