Yossi Aviram, réalisateur israélien : « Une promenade entre réalité et imagination »

Le film Il n’y a pas d’ombre dans le désert du réalisateur israélien Yossi Aviram raconte une histoire d’amour sous les sombres auspices de l’Histoire et de la mort. Valeria Bruni-Tedeschi, qui a participé au scénario, s’y investit aussi comme actrice. Le réalisateur est venu le présenter jeudi dernier aux Carmes. Magcentre l’a rencontré.

Anna (Valeria Bruni-Tedeschi) et Ory (Yona Rozenkier). Photo Films du Losange.

 

Par Bernard Cassat, vidéo Gérard Poitou


Le projet est né de la rencontre entre Yossi Aviram et Valeria Bruni-Tedeschi. Yossi avait écrit un script sur une rencontre entre un personnage israélien amoureux du désert et une actrice qu’il enlève et emmène dans le désert. Il a soumis l’idée à Valeria lors de leur première rencontre. Elle a sauté sur l’idée, la transformant et la complétant avec le procès d’un nazi à Tel Aviv qui justifie la rencontre.

Cette relation initiale très particulière entre deux personnes de la génération des enfants de déportés se teinte du caractère des deux protagonistes. Lui, Ory (Yona Rozenkier), homme dépressif et hanté par un squelette qu’il a trouvé dans le désert, se présente tout de suite comme suicidaire, en tout cas capable de passer à l’acte. Elle par contre, dans la première séquence de présentation du personnage, semble très inscrite dans sa réalité de femme équilibrée, écrivaine déjà bien reconnue.

Le cadre sombre d’une histoire beaucoup plus légère

Une fois à Tel Aviv, leur rencontre qui est peut-être fortuite, peut-être pas, repose sur le souvenir évoqué par Ory d’une première histoire à Turin il y a vingt ans. Turin, où tous deux seraient venus après le suicide de Primo Levi. Il raconte, avec des images animées. Elle nie, ne reconnaît pas cette première rencontre, ne reconnaît pas Ory. On entre là dans les thèmes chers à Yossi Aviram, les souvenirs toujours incertains, les limites fluctuantes entre réalité et fiction, l’importance des histoires, qu’elles soient vraies ou pas. Ce qui englobe l’idée de flirt avec la folie, en tout cas cette limite floue entre normalité et extraordinaire.

Le désert israélien. Photo les Films du Losange.


Côté réalité, les scènes de procès montrent surtout Batya (Germaine Unikovsky), la mère d’Ory, à peine crue par l’avocat de la défense lorsqu’elle raconte devant tout le tribunal, et son fils dans le public, les atrocités que l’accusé a commises. Par les hasards du scénario, Anna n’aura pas le récit de son père, qu’elle souhaitait pourtant entendre.

Les thèmes favoris de Yossi Aviram

Coté plus imaginaire, l’ « enlèvement » d’Anna par Ory, qui détourne la jeune femme et l’emmène dans le désert. Beau décor où le temps comme l’espace semble se distendre, où les sentiments se déploient hors du reste du monde « normal », celui en tout cas qui fait le quotidien d’Anna. Que Turin ait existé ou non, le désert impose ce deuxième temps dans la relation.

L’antinomie entre le poids de l’Histoire et cette « petite » histoire relationnelle, la tension entre réalité et fiction, créée chez Yossi Aviram une créativité instinctive intéressante. Ce récit à plusieurs facettes entraîne dans les dédales d’une personnalité israélienne, de son ressenti autant géographique qu’historique. A l’heure actuelle, cette vision affective et indirecte, très personnelle, nous parle aussi de la situation de cette région du monde.



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