Les présidents des six conseils départementaux de la région Centre-Val de Loire se sont retrouvés dans le château qui domine l’Indre pour défier l’État… à deux pas de la résidence du préfet. Ils ont écrit au Premier ministre et à la directrice de l’ARS.
Les « mutins » sur la terrasse du Château Raoul. Photo PB
Par Pierre Belsœur.
Est-ce l’esprit du Grand Condé, meneur de la fronde des princes contre le cardinal Mazarin au début des années 1650 et propriétaire du Château Raoul à cette époque, qui habita Marc Fleuret lorsqu’il choisit le lieu de la réunion du G6 du 5 mai 2025 ? En tout cas les six présidents des conseils départementaux de la région Centre-Val de Loire, leurs chefs de cabinet et leurs voitures noires haut de gamme de marques françaises ont passé la matinée de ce premier lundi de mai dans l’enceinte du château. Sept voitures en fait, car Nicolas Lacroix, président du Conseil départemental de Haute-Marne, mais aussi du groupe des 73 départements « Pas de gauche » s’était joint à ses collègues. Et ça tombait bien puisque Jacques Fleury (Cher), Christophe Le Dorven (Eure-et-Loir), Marc Fleuret (Indre), Nadège Arnault (Indre-et-Loire), Philippe Gouet (Loir-et-Cher) et Marc Gaudet (Loiret) ne sont pas de gauche.
« Celui qui décide, c’est celui qui paie »
Le gouvernement ne l’est pas non plus, notez. Et si François Bayrou partage avec le cardinal son goût pour l’intrigue, nos six princes et princesse départementaux se dressent avant tout contre le pouvoir, qui décide sans concertation une augmentation du RSA. Augmentation d’autant plus généreuse que ce sont les départements qui paient. « C’est économiquement insupportable, estime Christophe Le Dorven, mais politiquement néfaste puisque le RSA augmente plus vite que le SMIC. Comment voulez-vous convaincre les bénéficiaires du RSA à aller travailler s’ils ne voient pas la différence à la fin du mois ? ». Pour Marc Gaudet le Loiret était territoire expérimental pour la mise en place des quinze heures de travail hebdomadaire effectuées par les bénéficiaires du RSA. « La mesure a été généralisée avant la fin de l’expérimentation, c’est bien que la décision avait été prise auparavant ».
Aussi les présidents des six départements décident :
- de demander de nouveau à l’État la juste compensation des trois AIS qui leur sont transférés.
- de ne pas payer aux opérateurs de l’État l’augmentation du RSA instaurée au 1er avril 2025.
- de refuser d’assumer financièrement toute dépense nouvelle ou supplémentaire décidée unilatéralement par l’État et non compensée intégralement par lui.
- De redonner à leurs collectivités une autonomie financière réelle pour assumer l’ensemble de leurs compétences, et notamment celle de l’incendie-secours dont la charge explose actuellement.
Au tour de Nadège Arnault de signer les lettres à destination du Premier ministre et de la directrice de l’ARS. Photo PB
Pas assez de personnel qualifié pour les EHPAD
Clara de Bort, directrice générale de l’agence régionale de santé (ARS) Centre-Val de Loire, a eu droit elle aussi à sa missive courroucée. Mieux elle a eu droit à deux lettres.
Le premier motif de mécontentement des présidents concerne les directives de l’ARS concernant l’encadrement des EHPAD. Les départements sont pris dans un cercle vicieux, il leur faut assurer cet encadrement alors que le nombre des personnels est dramatiquement insuffisant. Mais s’ils font appel à des personnels non qualifiés, ils devront les payer de leur poche… « Aussi, nous vous remercions donc de bien vouloir revoir votre position sur le sujet fondamental, dans l’intérêt même des EHPAD », concluent-ils avant de signer.
Autre sujet d’inquiétude, l’accueil des enfants handicapés pendant les week-ends et les congés scolaires. « Nous n’avons aucune structure spécialisée pour accueillir des mineurs les fins de semaine », reconnait Marc Fleuret. Là encore la stratégie nationale « Aidants » avait programmé « 50.000 » solutions, en particulier pour cet accueil. Les présidents demandent donc que ce catalogue devienne réalité.
Loin de nous l’idée de chercher à impressionner Clara de Bort, mais le Grand Condé avait interné son épouse dans le château Raoul, elle y a passé ses vingt dernières années.
Marc Fleuret était la puissance invitante de ce G6 qui réunit les présidents deux fois par an.
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