Thomas Lebrun nous fait voyager au Mexique dans une communauté non-genrée

Après un séjour d’étude en résidence au Mexique, le chorégraphe tourangeau Thomas Lebrun construit un spectacle à la fois austère par la chorégraphie minimaliste et foisonnant par les costumes et le son. Cinq danseurs restituent, dans un rituel étrange et exotique, l’essence même des Muxes, ces personnes assignées homme à la naissance qui revendiquent un autre genre. Sous les fleurs était au Théâtre d’Orléans mardi 16 décembre.

D’étranges prêtresses. Photo Frédéric Iovino.



Par Bernard Cassat.


Les sociétés très genrées, aux modèles virils forts comme la branche hispanique a pu les développer, ont parfois des niches sociales qui permettent aux personnes échappant aux normes admises de trouver un refuge accepté par l’ensemble social. Les « Muxes » du Mexique en ont construit un. Thomas Lebrun est parti les découvrir et en ramène un spectacle original.

À base de morceaux d’interview malheureusement non traduits de Felina Santiago Valdivieso, une militante Muxe, il met en scène cinq danseurs qui nous transmettent le monde Muxe. Habillés avec de magnifiques costumes, plusieurs épaisseurs de robes toutes plus belles les unes que les autres, des gilets rutilants brodés, ils déroulent une sorte de cérémonie lente, mesurée, contrôlée. On entend parfois au loin le bruit du monde, des événements de style corrida ou fête de ville, comme pour bien indiquer qu’on entre dans le secret. Comme tout rituel, celui qui se déroule sur scène a un aspect religieux même s’il est totalement païen.

Un côté aztèque. Photo Frédéric Iovino.


Une bande son très travaillée soutient le spectacle. Partant d’un morceau musical diffusé en ouverture aux guitares fortes et typiques, qui nous introduit dans l’ambiance espagnole, différentes chansons ou musiques diffusent cette émotion profonde que le monde hispanique sait manier avec force. La Llorona, bien sûr, est un moment majeur du spectacle, mêlant violence, infanticide, tragique, mort et amour filial, vengeance et provocation.

D’autres chansons plus calmement émotives sont chantées en playback par les Muxes sur scène et l’effet est réussi. La chorégraphie s’articule autour d’images fortes, les cinq danseurs en ordre de taille qui jouent avec leurs robes comme avec des grands éventails, les déplacements ordonnés, les pas comptés. Il y a peu de vraie danse, mais on sent au moindre geste que seuls des danseurs peuvent se déplacer ainsi.

Des masques mexicains. Photo Frédéric Iovino.


Les influences musicales s’ouvrent au fur et à mesure, et le spectacle finit dans les fleurs. Ce voyage étrange construit par Thomas Lebrun est un grand manifeste pour la différence et la liberté. Rassemblant la très grande émotion de la musique, l’austérité des gestes, de la scène nue et le décor minimaliste coloré par la lumière, le spectacle pose des questions par sa seule esthétique. Celle du genre, ou plutôt du non-genre, est au centre du travail. Une pierre supplémentaire, esthétiquement brillante, à la réflexion actuelle.


Plus d’infos autrement :

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