Face à une majorité divisée conduite par la maire Marie-Agnes Linguet, qui se représente avec le soutien d’En Marche mais qui devra affronter une liste dissidente issue de ses rangs la gauche s’est rassemblée. Il faudra aussi compter avec « le trublion » Stéphane Kuzbyt qui pousse ses pions.
Une mairie très convoitée et très disputée
La palme des divisions
C’est peu dire que la campagne municipale s’annonce indécise à Fleury-les-Aubrais. Dans la deuxième ville de l’agglomération la compétition est engagée avec la première (Orléans) pour remporter la palme de la division, des affrontements personnels, des antagonismes voire des rancœurs et des haines longtemps refoulées et désormais exposées à l’air libre. Car la guerre est déclarée entre la maire Marie-Agnès Linguet (UDI) élue en avril 2014 à la suite du centriste Pierre Bauchet et certains de ses colistiers.
Les hostilités ont débuté en février 2018 quand Sophie Loiseau a perdu son poste d’adjointe à l’économie et à l’emploi. Depuis les rancœurs ont muri lentement, Sophie Loiseau rassemblant autour d’elle un groupe de 7 dissidents. En apothéose de cette guerre civile : la décision il y a quelques semaines de Mme Linguet de retirer leurs délégations à 4 élus, 3 adjoints un conseiller alors qu’un autre adjoint rendait lui-même sa délégation. Depuis, les conseils municipaux (trois en moins d’un mois depuis fin novembre) se déroulent au rythme des accrochages voire des insultes.
« Les Fleuryssois » en première ligne
Marie-Agnes Linguet, maire de Fleury
Derrière Sophie Loiseau les 7 frondeurs se sont rassemblés dans « Les Fleuryssois Le collectif citoyen » qui présentera sa liste aux municipales. Un collectif à priorité classé lui aussi à droite (terme qu’il récuse) mais qui se définit avant tout comme « citoyen ». Et cela d’autant plus qu’il a réussi à attirer dans ses filets l’ancien socialiste Michel Breffy, conseiller départemental PS depuis 2004 et Fabienne Leproux-Vauzelle (ex-UDI… comme la maire) et adhérente République en Marche… qui soutient par ailleurs Marie-Agnès Linguet bénéficiaire de l’investiture officiel du parti présidentiel. Face à une telle situation, la fenêtre pourrait paraître presque grande ouverte à la gauche qui a dirigé jusqu’en 1995 cette ville durant plus de 20 ans avec le populaire et truculent communiste André Chêne. Pour relever ce défi, PS, PCF et EELV ont décidé d’opérer un virage inédit pour aboutir « à un rassemblement de toute la gauche et des citoyens de gauche ».
La gauche unie pour la première fois depuis 2001
La gauche unie pour reconquérir Fleury
La liste qui sera dévoilée en janvier sera conduite par Carole Canette, « patronne » des socialistes dans le Loiret avec à ses côtés Bruno Lacroix du PCF et Johann Fourmont pour les écologistes. Alors que certains « historiques » de la gauche fleuryssoise rangent leurs cartons comme Alain Roméro pour les communistes ou Bernard Martin pour les écologistes, cette liste se veut donc celle du « renouvellement et de l’expérience », même si Carole Canette menait déjà la liste socialiste en 2014. « Le contexte national mais surtout local expliquent les trois chefs de file, nous obligent à ce rassemblement. Face à cette majorité divisée, fissurée qui s’affronte, s’insulte et se menace il ne pouvait pas y avoir d’autre réponse que celle du rassemblement ». Et cela d’autant plus que les trois partis dénoncent « une ville à la dérive, avec des projets mal menés ou avortés, avec une politique municipale qui part à vau-l’eau où les quartiers sont mal entretenus, les services publics en berne, l’urbanisme étouffant, où le seul projet Interives a été confisqué par la Métropole et échappe à Fleury et où les quartiers sont abandonnés sans aucun renouvellement urbain. ».
Redresser une « ville à la dérive »
Carole Canette veut être le prochain maire
Dernier exemple de cette dérive : la fermeture de l’Ephad de Daumézon et l’émergence d’un projet « mal ficelé dans l’urgence » pour le remplacer mais pas avant deux ans. Face à ces abandons la gauche avance ses réponses en proposant l’union, pour la première fois depuis 2001. En cas de triangulaire au second tour elle pourrait reprendre la main. Mais c’est sans doute compter sans un autre larron, Stéphane Kuzbyt, ancien socialiste qui avait déjà mené une liste en 2014 en obtenant 12% des voix avant de se retirer pour le second tour. Carole Canette comme Bruno La croix et Yohann Fourmont lui dénient l’étiquette « d’homme de gauche ». : « le collectif qu’il préside expliquent-ils, est à son service exclusif pour une aventure qui n’est que personnelle… ».
« Pour que ça change » à Fleury
Pas démonté par ces critiques Stéphane Kuzbyt entend cette fois « aller jusqu’au bout » et « avoir des élus ». Pas question donc d’envisager une défaite, voire un retrait après le premier tour ou une fusion avec une autre liste. Lui qui se définit comme un « homme de centre gauche et écologiste » a d’ores et déjà constitué sa liste qui a été en partie présentée vendredi soir au local de campagne à Lamballe. Si la liste ne sera officiellement présentée qu’en février, son appellation est acquise : « pour que ce change » et son programme en grande partie défini. La liste « écologiste, citoyenne et solidaire » se battra autour de plusieurs priorités : « mettre la ville en transition », « associer les habitants à leur quotidien », « développer la solidarité ». Stéphane Kuzbyt annonce que s’il est élu il « sera un maire à temps plein, y compris en renonçant à mon activité professionnelle et sans aucun autre mandat », une pierre jetée dans le jardin de Marie-Agnès Linguet qui professait hier les mêmes volontés. Une maire qu’il dénonce dans détours : « ceux qui n’ont rien fait pendant six ans sont aujourd’hui disqualifiés ». Avec trois écologistes anciens encartés chez EELV comme Denis Bouchardon la liste va aussi aller brouter sur les plates-bandes de la liste rose-verte de Carole Canette. « Peu importe répond-il ce qui compte ce sont les décisions, nous planterons 1 000 arbres, la biodiversité sera une priorité, les derniers clos seront préservés ».
Triangulaire ? Quadrangulaire ?
Stéphane Kuzbyt
Pour la vie citoyenne une « commission extra-municipale » permettra d’associer élus, habitants et professionnels pour étudier la transition écolo de Fleury. Enfin Stéphane Kuzbyt veut faire de la solidarité la pierre angulaire de la future vie fleuryssoise « avec une politique forte pour les scolaires et la jeunesse, pour la solidarité entre les générations, pour un nouvel Ephad.
Grâce à une triangulaire probable imposée par les deux listes de droite la gauche avait toutes ses chances de l’emporter au second tour. Mais avec Stéphane Kuzbyt et la possibilité de dépasser le seuil des 10% des suffrages exprimées au premier tour toutes les hypothèses sont envisageables. Et pourquoi pas une quadrangulaire ce qui rend aujourd’hui impossible toute projection crédible pour le 22 mars au soir.
J.-J.T.