Maurice Genevoix, un immortel perpétuel au Panthéon#1

Les Artistes Orléanais ont été fondés et présidés par Maurice Genevoix fin 1923, à partir de l’École de la Loire créée en 1920, il y a cent ans, moment du transfert du soldat inconnu à l’Arc de Triomphe. Pour commémorer ce Centenaire, le romancier de la Grande Guerre et de la Loire entrera dans un mois au Panthéon, le 11 novembre 2020.

À l’occasion de leur 113e salon qui se tient jusqu’au 25 octobre à la collégiale Saint-Pierre-le-Puellier, retour sur cet itinéraire mémoriel, la place du Panthéon dans la mémoire républicaine et l’oubli relatif puis la redécouverte de ce grand écrivain qu’est Maurice Genevoix. Leur président Benoît Gayet a généreusement autorisé Magcentre à reproduire ce texte de Pierre Allorant consacré à l’hommage à Maurice Genevoix à l’occasion de son entrée au Panthéon.

Le Panthéon de Paris, gravure en 1794-1795, Jean-Baptiste HILAIR (1751–1828) Bibliothèque nationale de France

Cinq ans après son jeune disciple littéraire du Grenier, Jean Zay, le temple de la République va à nouveau accueillir, le 11 novembre 2020, un illustre Orléanais. Cent ans après l’inhumation du Soldat inconnu, pour l’abri duquel l’Arc de Triomphe l’avait emporté sur un transfert au Panthéon, le grand écrivain Maurice Genevoix va être à nouveau honoré, après avoir reçu, lors de ses obsèques célébrées le 15 septembre 1980 en l’église Saint-Louis des Invalides, l’hommage de la nation au « meilleur ambassadeur de la langue et de la culture française » et les honneurs militaires (1).

Le Panthéon : création révolutionnaire, socle impérial et alluvions républicains

Mais qu’est-ce donc que le Panthéon et quels critères régissent les admissions à cette « École normale des morts » ? Le Panthéon a été désaffecté par la Révolution française pour accueillir les cendres de la fine fleur des Grands Hommes des Temps nouveaux : Mirabeau, Voltaire, Rousseau. Mais la porte est à double sens, car l’accélération du processus révolutionnaire révèle les turpitudes du grand orateur monarchien, avant que la Terreur ne fasse le tri entre le bon grain des patriotes et l’ivraie des girondins et autres modérantistes. Napoléon Bonaparte, soldat de la Révolution, transforme son temple en nécropole des dignitaires impériaux morts en fonctions, fournées militaires et civiles qui occupent encore la moitié des rangs.

L’arrivée des cendres de Voltaire au Panthéon. Gravure de Jean-Jacques LAGRENEE (dit Le Jeune) (1739-1821), après 1791 – Musée Carnavalet – Histoire de Paris – Inventaire G.21780

Les trois dernières Républiques ont complété le tableau d’honneur, le Panthéon étant rendu à cet office à compter de l’entrée de Victor Hugo en 1885. Zola, Gambetta au lendemain de la Grande Guerre, Jaurès avec le Cartel des gauches en 1924, Paul Painlevé en 1933 sont choisis par les députés de la « plus longue des Républiques ».

Victor Hugo parmi les grands Hommes, le 1er juin 1885, accompagné par 2 millions d’admirateurs.

Si la Quatrième République a été très parcimonieuse sur ce plan en réservant l’entrée au Panthéon aux scientifiques Paul Langevin et Jean Perrin, au gouverneur « Français libre » Félix Éboué, à l’émancipateur Victor Schoelcher et à Louis Braille, le Panthéon reste à jamais associé à la mémoire du « préfet résistant » d’Eure-et-Loir, à Jean Moulin l’unificateur salué avec un lyrisme d’outre-tombe par Malraux en décembre 1964.

Hasard ou nécessité, après une longue éclipse sous Georges Pompidou et Valéry Giscard d’Estaing, les portes du Panthéon ne rouvriront, intronisation médiatisée de François Mitterrand exceptée, que 23 ans plus tard avec l’hommage au juriste René Cassin. François Mitterrand, fidèle aux amis disparus et au culte des morts, est le recordman des panthéonisations : Jean Monnet l’européen, puis avec le bicentenaire de 1789, Condorcet, l’abbé Grégoire et Monge, enfin en avril 1995 Pierre et Marie Curie ont reçu cette consécration sous ses deux septennats.

Depuis lors, Jacques Chirac a tenté de raviver la flamme avec précisément André Malraux, puis un hommage en 2002 à Alexandre Dumas le métis, pour conjurer la haine frontiste. Enfin François Hollande a réuni en gerbe quatre mousquetaires de la Résistance, chacune et chacun porteurs des valeurs de la République, de A comme Anthonioz à Z comme Zay. Ainsi, le Centre-Val de Loire est-il déjà présent au Panthéon : si Blois est dignement représenté par l’abbé Grégoire émancipateur des Juifs français et Chartres par le premier « résistant de la veille », le préfet Jean Moulin, « Max » l’unificateur de la Résistance, le Loiret a été pionnier avec Mirabeau et Orléans a été particulièrement honoré avec Jean Zay et bientôt Maurice Genevoix,

incarnations des souffrances, du courage et des valeurs humanistes lors des deux guerres majeures du vingtième siècle. Il reste bien entendu de nombreuses gloires artistiques, littéraires, scientifiques, médicales ou de combats militants à honorer en Orléanais, Berry et Touraine : George Sand, Antoine et Henri Becquerel, Marcel Proust, Olympia Cormier, François Rabelais, Jeanne Champilou, Olivier Debré… il n’y aura que l’embarras du choix. 

 

(1) Une croix blanche étant dressée à l’avant du cercueil en mémoire de ses compagnons tombés au front, et le casque d’un défenseur de Douaumont, transpercé d’une balle, étant accroché à son cercueil.

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