À Tours, le retour des étudiants en présentiel est plus que nécessaire

Avec la pandémie, les étudiants connaissent de nombreuses difficultés. Des filières en sciences humaines de l’Université de Tours ont repris certains cours en présentiel en ce début de mois de février. Un rythme qui permet de renouer un tant soit peu avec l’apprentissage.

En ce début de mois de février 2021, les étudiants reprennent timidement les cours en présentiel. ©Elodie Cerqueira

Une fois passé la porte de l’Université des Tanneurs, à Tours, quelques étudiants s’empressent de rejoindre leurs travaux dirigés à 10 heures tandis que d’autres font une pause car en ce début de février, ils peuvent enfin revenir dans leur établissement universitaire. D’après Léna et Catherine, le retour en présentiel est un soulagement. « Ça fait du bien d’avoir des relations humaines ! ».

Les deux étudiantes en première année de philosophie sont ravies de pouvoir discuter en face-à-face. « Le contact avec les professeurs change tout. On a de la chance par rapport à d’autres filières comme médecine où la compétition est rude. Nos professeurs sont très attentifs. » Même chose pour Maxime : « En présentiel, tu n’as pas le choix, tu es obligé de te concentrer. Heureusement, sinon j’aurais déjà sorti ma guitare ! »

Apprendre en temps Covid

Suivre les cours à distance n’est pas aisé : distractions, wifi instable ou surcharge de travail sont le lot quotidien des étudiants. De fait, il n’est pas toujours évident de tenir l’apprentissage sur la longueur. Et l’écrémage habituel des classes en début d’année s’est accéléré avec la pandémie. « Même s’il y a toujours des erreurs d’orientation avec Parcours Sup, on est quand même passé de soixante à trente élèves en première année », constate Léna.

Catherine, employée d’escape game en reprise d’étude, est perplexe : « La situation pèse sur la jeunesse. L’avenir appartient aux jeunes et à 20 ans on a envie de sortir, pas de rester chez soi toute la journée. » Les doctorants de psychologie ont d’ailleurs créé un groupe de soutien sur Discord, logiciel de messagerie, pour pallier la distanciation. Si le virtuel est parfois pesant, il permet cependant de renforcer des liens au sein des différentes promotions : « On a des conversations de groupe sur Messenger, Discord et Instagram. Nous sommes constamment en train d’échanger afin de comprendre certaines notions ou faire des retours sur nos copies respectives. On est beaucoup plus proches qu’avant », souligne Catherine.

IUT Tours

Les étudiants ont désertés l’université, pandémie oblige. ©Elodie Cerqueira

Dans une enquête interne menée par la faculté d’Art et de Sciences Humaines, 60 % des étudiants avaient manifesté la nécessité de reprendre des cours en présentiel. Du côté de l’équipe pédagogique, des dispositifs sont mis en place, comme le tutorat. Le principe ? Un étudiant de troisième année ou plus qui accompagne un élève en première année. Des rendez-vous ont déjà eu lieu dans le mois et d’autres pourraient se mettre en place pour les élèves plus décrocheurs. Le but ? Être accompagné et soutenu dans l’application d’une méthodologie.

Difficultés psychologiques

Précarité économique, isolement et distanciel ont entraîné des souffrances psychologiques. Nicolas Oppenchaim, vice-président de l’Université de Tours en charge de la santé souhaite la présence d’un troisième psychologue pour renforcer les services déjà en place. « Le moral n’est pas bon. Certains étudiants ont perdu leurs boulots et d’autres sont victimes de la perte d’emploi de leurs parents. On réfléchit à mettre en place des espaces où les étudiants pourraient se retrouver en petit groupe, avec la présence d’un coordinateur. »

Selon Catherine, les impacts peuvent être psychiques comme physiques. Soumise au stress, la prise d’anxiolytiques fut nécessaire pour elle. « J’ai pris 12 kilos, parce que je ne bouge plus. » Lise se plaint quant à elle de migraines et de douleurs oculaires auxquelles s’ajoutent les doutes. « Pendant un moment, j’ai pensé à changer d’orientation ou à trouver un travail. Mais de toute façon, il n’y a pas de travail ! (rires). On est incapable de se projeter dans notre formation, on vit au jour le jour », regrette-t-elle.

Pour Yzéa, la pandémie a renforcé un moral déjà flanchant : « Je ne comprends pas ce deuxième confinement et cet entre-deux. » Vivant à une heure de Tours et donc de l’université, Yzéa n’a pas le temps de voir ses amis. « Avec le couvre-feu, je suis obligé de rentrer dès que j’ai terminé mes cours. Donc la distance joue beaucoup sur le moral aussi. »

Professeurs sous l’eau

Les cours pour les premières années de licence de musique, philosophie et sciences de l’éducation reprennent doucement, ainsi que pour d’autres licences de deuxième et troisième année. Malgré tout, les élèves doivent se soumettre à la jauge des 20 % sur site. Benoit Wolf, responsable administratif de la faculté d’arts et de sciences humaines, explique cette reprise progressive : « On essaie de privilégier les filières où il y a le plus de travaux pratiques mais aussi de décrochages. Les élèves ne tiennent pas sinon. »

Les étudiants vont mal et ce dans toutes les filières. Perte de confiance et culpabilité sont souvent mentionnées dans les mails adressés aux professeurs. Thomas Sigaud, maître de conférences en sociologie, souligne cet aspect : « Certains coupent leurs caméras pour pleurer. Même les étudiants les plus robustes sont touchés. La digitalisation rêvée de l’enseignement à ses limites. Même s’il y a un fantasme du distanciel en simultané partout en France, on voit bien que ça pose problème. »

Chez les professeurs, la capacité de travail est elle aussi en baisse. La correction des copies sur écran est une torture. Des heures supplémentaires et du secrétariat viennent s’ajouter à un enseignement déjà chargé. « Nous sommes 20 enseignants-chercheurs pour 1000 étudiants. L’équipe est complètement dépassée par la crise et les enjeux pédagogiques. Et ce n’est pas en changeant toutes les deux semaines de directives que ça ira mieux », ajoute Thomas Sigaud. Un service public qui est à l’os et qui fait écho aux revendications des enseignants-chercheurs quelques mois plus tôt : créer des postes supplémentaires !

Ana Rougier

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