La métropole orléanaise peut-elle protéger la santé de ses habitants ?

par Jean-Paul Briand

Un livret intitulé La métropole par la santé ?, écrit par quatre universitaires orléanais : Pierre Allorant, Sylvain Dournel, Fouad Eddazi et Frank Guerit donne du grain à moudre pour tous ceux qui se désespèrent de la désertification médicale en Centre-Val de Loire et plus particulièrement pour la métropole orléanaise. Leur document, d’une centaine de pages, dénonce cette situation unique en France qui fait que le principe d’égalité d’accès aux soins et du droit à la protection de la santé de l’alinéa 11 du préambule de la Constitution est bafoué pour les habitants de la métropole orléanaise !

Photo JPB

Afin de mieux saisir les enjeux et les évolutions associés aux villes et aux territoires, la Plateforme d’Observation des Projets et Stratégies Urbaines (POPSU) associe les milieux de la recherche et ceux qui gouvernent les cités. C’est dans le cadre du programme POPSU Orléans Métropole que l’ouvrage des quatre universitaires a été conçu après un an de travaux réunissant enseignants-chercheurs, élus locaux, étudiants de master, représentants des professionnels de la santé et techniciens des collectivités territoriales, mais aussi des chefs de service santé, des directeurs généraux de service, des chercheurs, des élus intercommunaux et régionaux, des professeurs de médecine et des membres du conseil de développement métropolitain. 

Lorsque l’on considère la densité des professionnels de santé, les chercheurs auteurs du texte rappellent qu’Orléans Métropole est la capitale d’une région classée au dernier rang. « Depuis la refonte de la carte des régions et l’intégration de la Picardie au sein des Hauts-de-France, la région Centre-Val de Loire est la région la plus sous-médicalisée », précisent-ils. La désertification médicale qui sévit sur Orléans et en région Centre-Val de Loire n’est malheureusement pas un scoop puisque, dans son bulletin de juin 2013, l’Insee titrait déjà : « Un médecin généraliste sur deux à remplacer dans les dix ans à venir : un défi pour la région Centre ». Il faut aussi indiquer que cette catastrophe sanitaire a été programmée dans les années soixante-dix.

L’inégalité d’accès aux soins se creuse dans la capitale régionale

La loi du 28 février 2017 a élargi la notion de métropole et a ainsi permis à Tours et Orléans d’obtenir ce statut juridique jusqu’alors réservé à une dizaine de grandes villes de province. Ce titre de métropole, désormais porté par Tours et Orléans, est pour beaucoup complaisant, présomptueux, voire usurpé. Ce terme est en effet souvent synonyme de grande agglomération peuplée de plus de 500 000 habitants, aux infrastructures et évènements de classe internationale, (aéroports, manifestations culturelles et sportives…). Ce n’est pas le cas pour les deux récentes métropoles du Centre-Val de Loire. Dans le dernier quart des 22 métropoles, Orléans, fait unique en France, est une métropole incomplète du fait de son absence de faculté de médecine qui prive son centre hospitalier de l’attractivité liée au label universitaire et a pour conséquence d’aggraver la pénurie de médecins dans son périmètre d’influence. Les médecins s’installant toujours préférentiellement près de leur faculté formatrice. L’inégalité d’accès aux soins se creuse dans la capitale régionale, pénalise son attractivité, son rayonnement et la qualité de vie de ses habitants.

Un défaut de coopération avec l’autre métropole de la région

Les quatre plumes du cahier POPSU, déplorent que « le volontarisme métropolitain, pour contribuer à améliorer l’offre de soins, se heurte à un cadre juridique limitant ses leviers d’action (…) le droit en vigueur ne donne pas un rôle éminent aux métropoles à propos de la politique d’offre de soins ». Mais la véritable cause de cette grave pénurie de professionnels de santé sur l’orléanais est pointée par l’Observatoire régional de santé (ORS). Dans son rapport de décembre 2015, « une raison essentielle au manque de médecins dans l’Orléanais est l’éloignement des universités de formation » alarme clairement l’ORS. Par ailleurs les auteurs du livret dénoncent « un défaut de coopération avec l’autre métropole de la région, Tours Métropole-Val de Loire, doit être souligné, notamment sur la question de la formation des médecins. Depuis quelques années, l’Orléanais souhaite en accueillir une partie. Cependant, le territoire se heurte aux refus successifs de la faculté de médecine de Tours, tant à propos de l’ex-Paces (première année commune aux études de santé) que du nouveau PASS (parcours accès santé spécifique) qui lui a succédé. Ces refus sont endossés par la faculté de médecine, et non par les élus tourangeaux, qui restent silencieux sur le sujet, en particulier les élus métropolitains ». De par la loi, il est pourtant possible, rappellent les quatre scientifiques, « que deux ou plusieurs CHR passent une convention avec la ou les universités de cette académie, pour la constitution d’un CHU unique »…

Le mot d’ordre : « un CHU à Orléans »

Orléans métropole n’est encore que très partiellement une authentique métropole. Sa qualité de vie et son attractivité sont fortement handicapées par la pénurie de médecins qui va encore s’aggraver dans la prochaine décennie. Les quatre chercheurs s’interrogent alors : « La santé serait-elle la pierre philosophale d’une construction métropolitaine de l’Orléanais ? » Ils suggèrent que « la métropole pourrait, paradoxalement, se construire par la santé ». Ils ajoutent que « le mot d’ordre un CHU à Orléans – reste la réponse la plus mobilisatrice pour les acteurs locaux, car elle offre une solution pour relever les défis locaux de santé, comme l’installation de praticiens par l’attractivité du territoire, et une réponse à un besoin d’équité »…

La ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, Frédérique Vidal, vient de recevoir le document POPSU des quatre universitaires orléanais. Le lira-t-elle et viendra-t-elle en aide aux territoires orléanais ?

Commentaires

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  1. C’est une raison de plus qui m’a décidé à quitter Orléans, le nouvel hôpital inaccessible et Oréliance qu’il faut fuir dans son mode de déorganisation.

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