Victoire Tuaillon : « La violence masculine n’est pas naturelle ! »

La dernière saison des Nocturnes féministes du FRAC d’Orléans a démarré tambour battant devant une salle pleine ce jeudi 4 avril 2024 grâce à deux jeunes podcasteuses culottées : Victoire Tuaillon et Mathilde Leïchlé.

Nocturne féministe Frac Orléans : Victoire Tuaillon et Mathilde Leïchlé
Nocturne féministe FRAC Orléans : Victoire Tuaillon et Mathilde Leïchlé. Photo SD


Par Sophie Deschamps


Créer des podcasts en féministe : sonorités intimes et politiques. C’était le titre, un peu alambiqué, de l’avant-dernière nocturne féministe du FRAC Centre à Orléans pour la venue de Victoire Tuaillon, journaliste, écrivaine et podcasteuse féministe. Une rencontre animée par Mathilde Leïchlé, également podcasteuse et chercheuse en histoire de l’art. 

Même si l’assemblée était en majorité féminine, quelques hommes étaient présents pour découvrir les secrets de fabrication des podcasts féministes de Victoire Tuaillon, notamment Les Couilles sur la table (82 épisodes) puis Le Cœur sur la table, produits à partir de septembre 2017 par Binge Audio (société française de production et de diffusion de podcasts).

Un média libre, simple à utiliser et peu coûteux 

Le choix du podcast s’est vite imposé à Victoire Tuaillon. Comme elle l’a expliqué lors de cette nocturne, « le podcast a l’énorme avantage de n’être pas cher à produire. C’est d’ailleurs pour cela qu’il y a beaucoup de podcasts féministes. Ce sont un peu les nouveaux blogs en fait. C’est aussi un média libre même si on a tendance à toutes adopter un accent parisien. De plus, c’est extrêmement joyeux tout ce que l’on peut créer avec les podcasts ».

Pourquoi “Les couilles sur la table”

Le moins que l’on puisse dire, c’est que le nom du premier podcast interpelle. Victoire Tuaillon concède : « Un peu par esprit de provocation, le nom ne laisse personne indifférent. Comme je l’ai écrit dans le livre éponyme (2019) “avoir des couilles” c’est synonyme de courage comme si cette qualité ne pouvait être que virile. Donc, je me suis dit que cette table sur laquelle il est valorisé de les poser, on pouvait la transformer en table d’examen, de discussion et de dissection de la masculinité. »

Car Victoire Tuaillon a choisi de s’intéresser aux masculinités parce que, indique-t-elle sans détours, « quand on parle des femmes, ça n’intéresse pas grand monde, on s’en fout un peu. En fait, dans cette société misogyne, on passe notre temps à regarder les hommes et à les admirer. En m’intéressant aux masculinités, c’est juste une autre façon de parler des mêmes choses : comment les femmes vivent, dans quelles conditions matérielles on évolue, les violences sexuelles… C’est terrible, mais les témoignages de femmes victimes de violences, on ne les écoute pas. Alors que se demander pourquoi les mecs font ça et ce qui se passe dans leur tête, là d’un coup ça interpelle. Je suis donc partie de mon étonnement de cette construction du monde. Je trouvais que ça valait le coup de créer des épisodes qui répondaient aux questions qui moi m’obsédaient. Donc très vite, on a fait des émissions avec les questions Qui sont les violeurs ? Qui sont les harceleurs ?… »

Dénaturaliser la violence masculine 

Victoire Tuaillon a aussi insisté sur la nécessité de dénaturaliser la violence masculine : « Cette violence a toujours été présentée comme une espèce d’essence. Les hommes seraient comme ça parce que les hormones… alors que pas du tout. Donc c’était aussi pour dénaturaliser ce que l’on croit savoir du comportement des hommes et des structures patriarcales qui soutiennent tout ça. »

De son côté Mathilde Leïchlé en a profité pour préciser que « le masculin est tellement présenté comme neutre que trouver des angles pour le remettre en question, c’est déjà un travail préliminaire très important. »

Un pas de côté pas si évident à adopter comme l’illustre cet exemple donné par Victoire Tuaillon : « Je le vois quand je transmets les valeurs de l’émission aux trois journalistes à qui je passe la main. L’une d’elles voulait faire un épisode sur la BD en s’interrogeant sur le trop peu de femmes qui en font. Je lui ai dit : Non la question pour nous, c’est pourquoi il y a autant de mecs dans la BD ? Pourquoi prennent-ils toute la place ? On regarde comment ils dominent en ayant l’air de ne rien faire. »

Livres de Victoire Tuaillon :

Les couilles sur la table

Le cœur sur la table 

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Disparition de l’œuvre Fuck Patriarcat

La cour du FRAC semblait bien vide ce 4 avril en l’absence de l’œuvre Fuck Patriarcat de Sammy Engramer, lacérée il y a deux mois et déjà découpée et volée fin juin 2022. En accord avec l’artiste, l’œuvre sera à nouveau recréée mais non réinstallée sur place. Comme elle fait partie des collections du FRAC, elle pourrait circuler dans des lieux culturels de la Région et au-delà, le message véhiculé étant toujours d’actualité…

L’oeuvre “Fuck the Patriarcat” découpée et volée fin juin 2022 a de nouveau été vandalisée début 2024. Photo Sophie Deschamps

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