Pour le peintre Gélis, né à Orléans en 1942, l’occasion était trop belle de répondre à l’invitation du galeriste orléanais Philippe Vasseur et de revenir ainsi à ses fondamentaux, l’univers de la Sologne, celle de Genevoix et d’Alain-Fournier, celle qu’il a lui même infiniment parcourue avec un bonheur de chaque instant. Vingt-cinq toiles figureront ainsi aux cimaises de la galerie orléanaise.
Daniel Gélis: “Je réactive ici des choses que je n’avais plus accomplies depuis vingt-cinq ou trente ans, c’est à dire des paysages, des gros plans sur les écorces, des futaies semblables à des êtres en bandeau; retravailler ce thème me permet de jouer sur les matières, le creux et le relief, le lisse et le grumeleux, le rapport du noir au blanc des bouleaux, ce blanc qui n’est jamais le même; selon les saisons et les heures du jour il s’y distille parfois, avec subtilité, du rose ou du vert tilleul.”
“La réalité telle qu’elle est ne me suffit pas”

Ici, Gélis célèbre ainsi les arbres, la rouille et le brun, les sentiers blancs et poussiéreux, l’humidité des étangs, les grands silences nimbant les toits des hameaux perdus en forêt sur des lopins de terre dont les découvertes continuent de l’émerveiller.
Daniel Gélis: ” L’œil est un prédateur. La réalité telle qu’elle est ne me suffit pas, j’ai besoin de gratter, d’aller voir ce qui se passe derrière. Je projette mon imaginaire dans l’univers dans lequel je me balade. Je suis dans la toile mais il n’y a pas, cette fois, dans cette évocation de la Sologne, de personnages ou de silhouettes.
Car ce serait anecdotique. En définitive, ces toiles sont des autoportraits. Il fut un temps où je faisais beaucoup de dessins et de croquis préparatoires mais à présent tout est dans la tête.
Aujourd’hui, quand je commence une toile, je sais où je vais puis vient le plaisir de patauger dans la peinture et de sortir de la gangue ces écorces.”
Un dialogue avec le vivant
Daniel Gélis, à nouveau: “A l’âge de cinq ou six ans, mais c’était en forêt de Marchenoir, mon grand père m’a fait découvrir les frondaisons, les fourrés, les mystères de la nature qui n’auront jamais fini de bouillonner en moi. Si je reviens sur ces étangs de Sologne, ce que j’aime c’est que ce sont des eaux calmes, non pas des eaux qui remuent mais de celles qui ont un petit côté mare au diable qui m’a toujours fasciné. Ici encore se trame ce rapport qui m’est si cher, à savoir celui de l’air et de l’eau.”
Dans le secret de la nature et de l’atelier
Daniel Gélis: ” Souvent, la toile se cristallise d’elle-même. Je l’abandonne parfois, la retourne dans l’atelier puis un beau jour je la redécouvre et tout advient. Dès lors, il s’agit de ne plus lâcher les pinceaux car ce que j’ai dans la tête est en train de se concrétiser. Cela dit, je tâtonne. J’ai beau avoir soixante ans de métier, je tâtonne toujours. La fameuse histoire de la page blanche est toujours là, mais je continue de me dire que si je me suis fait plaisir c’est que j’ai gagné.”
Retour aux sources
Et le peintre de poursuivre: “Aujourd’hui, je dois avouer que j’ai envie d’aller faire quelques toiles sur le terrain avec le chevalet. On ne le plante jamais par hasard mais là où l’on désire apprendre visuellement ce que l’on a sous les yeux. Tout cela pour travailler sur le motif, le plaisir de traduire non une vision rêvée mais celui d’emmagasiner formes et couleurs et graphismes, de continuer d’exercer l’œil et la technique. Souvent, quand je reviens dans l’atelier, il y a des effluves qui me passent dans la main et qui me viennent naturellement .”
Jean-Dominique Burtin
Galerie L’Art Ancien, 32, rue Jeanne d’Arc, Orléans.
Du mardi au samedi, de 10 heures à 12 heures et de 14 heures à 19 heures.
Renseignements: 02.38.62.39.75.
Livre qui retrace le fil rouge de la vie et de l’œuvre de l’artiste , ouvrage à l’abondante iconographie comportant de nombreux témoignages de journalistes, de galeristes et de propos de l’artiste est disponible à la galerie.
92 page. 25 euros.