Olympia Cormier, de Marchenoir à Ravensbrück

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En complément de la série Egal’O Ceser

Article publié le 2 octobre 2018 dans la rubrique Conférences

Le dernier colloque de l’association Mix-Cité “Quelle place pour les femmes en politique ?” fut l’occasion de revenir sur le destin tragique d’une institutrice loirétaine présenté dans une communication de l’historien Gérard Lauvergeon, co-auteur d’une plaquette éditée par l’Iufm d’Orléans, retraçant la vie de cette pionnière oubliée du féminisme.

photo LDH

Olympia Cormier nait à Marchenoir le 28 mars 1880 (41) d’un père terrassier et d’une mère couturière, dans un milieu rural pauvre mais dont plusieurs indices confirment selon Gerard Lauvergeon, l’engagement républicain dans une France où les conservateurs et royalistes espèrent encore une restauration monarchique.

Le prénom Olympia reste un mystère, car si l’aîné des deux enfants se prénomme Jules-Simon, prénom double faisant directement référence au ministre et chef du gouvernement républicain des années 1870, le choix original du prénom Olympia est peut être une référence à Olympe de Gouges, mais en aucun cas  à la toile homonyme de Manet qui fit scandale en 1865 ni, bien sur, à la célèbre salle de music-hall qui sera créée en 1893.

Institutrice…

Grâce aux lois de Jules Ferry de 1880, elle suit une scolarité qui lui permet d’obtenir le Brevet Élémentaire lui ouvrant les portes de l’Ecole Normale d’Institutrices d’Orléans en 1896, pour un cursus de trois ans de formation professionnelle complété par un Brevet Supérieur. L’Ecole Normale est à l’époque une sorte de couvent laïc où les futures “hussardes noires de la République” (telles que Péguy aurait du aussi les nommer), pensionnaires, elles sont encadrées par des enseignantes célibataires et les sorties du jeudi après midi sont en groupe et en rangs par deux ! Le statut d’institutrice, s’il garantissait alors une certaine autonomie aux femmes ainsi qu’a su en profiter Olympia Cormier, ce statut leur imposait, pour pratiquement toutes, un célibat avec résidence dans l’école obligatoire. Il semble qu’Olympia se soit résignée à cette contrainte et on ne lui connaît pas de vie sentimentale. (On ne lui connaît aucune correspondance privée)

Ceci ne l’empêche pas de marquer son originalité, diversement appréciée, tant dans sa pédagogie souvent exigeante que dans son uniforme noir qu’elle agrémentait d’une blouse écossaise, d’une écharpe et d’un béret rouge. Si les rapports d’inspection la concernant sont le plus souvent élogieux, son caractère lui vaut quelques conflits comme avec le maire de Saint Jean de la Ruelle où elle exercera de longues années, à propos de sa voiture garée sous le préau ! Et oui, fait extraordinaire pour l’époque, si l’on se souvient que les voitures démarraient avec une manivelle, Olympia Cormier possédait une voiture qui lui permettait, sans aucun doute, d’exercer plus facilement l’autre versant de son activité personnelle: le militantisme.

…et militante

Fondatrice et trésorière du Syndicat National d’Instituteurs dans le Loiret, elle doit se rendre à diverses réunions y compris à Paris comme trésorière nationale, et à défaut de militer ouvertement dans un parti politique, elle participe à des réunions publiques où elle n’hésite pas à défendre les droits des femmes, notamment dans une mémorable réunion de la Ligue des Droits de l’Homme de 1926 durant laquelle elle s’opposa à Jean Zay à propos du droit de vote des femmes, quand celui-ci défendait encore les thèses du parti Radical contestant aux femmes “les qualités politiques et notamment la raison”...

Justement curieuse de la chose politique, Olympia Cormier, devenue directrice d’école, participera à un voyage d’étude en U.R.S.S. en août 1935, dont elle fera un compte rendu public à son retour avant de prendre sa retraite l’année suivante et, malgré l’arrivée du Front Populaire, on ne lui connait plus d’activité publique jusqu’à ce jour funeste du 8 juin 1944 où Olympia Cormier est arrêtée par la Gestapo d’Orléans. Il ne semble pas qu’elle ait eu une activité de résistante mais compromise par une demande d’aide d’un résistant incarcéré, la Gestapo trouve dans la vie passée de cette militante un motif suffisant pour la déportation.

Agée de 64 ans,  elle sera envoyée au camp de Ravensbrück où elle croisera les destins d’autres femmes résistantes, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, Marie-Claude Vaillant-Couturier et Germaine Tillon, avant d’être assassinée du fait de son épuisement physique par les SS le 3 mars 1945.

Gérard Poitou

“Olympia Cormier, un destin d’institutrice”
de Gérard Lauvergeon et François Printanier

Edité par l’association des anciennes et anciens élèves des écoles normales et de l’IUFM du Loiret

Disponible à la bibliothèque d’Orléans

 

 

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