D’un côté, valoriser le surplus de productions bio et des invendus de producteurs, de l’autre, permettre aux consommateurs de se nourrir sainement à prix accessibles. Pour concilier ces deux besoins, Marie-Pierre Hory, aidée d’une dizaine d’acteurs de la chaîne alimentaire, a créé une conserverie à Férolles. Un petit laboratoire qui va bientôt devenir une grande conserverie municipale grâce à la commune de Bou.
Distribués en magasins bio, AMAP et dans des fermes pour la vente directe, les bocaux de Marie-Pierre Hory vendus de 2,40€ et 4,80€ permettent d’éviter de jeter les invendus des productions. Photo Estelle Boutheloup
Par Estelle Boutheloup
Sauce tomate, ketchup, tartinades, soupes, plats préparés, compotes, confitures ou simples légumes de terroir au naturel… Les bocaux de Marie-Pierre Hory ont le bon goût des recettes artisanales et des produits 100% bio. C’est à Férolles, à une vingtaine de kilomètres d’Orléans, à la Ferme de la Pharmacie, que la jeune entrepreneuse a installé son laboratoire de fabrication. « Une petite production de 4 000 bocaux en à peine deux ans ! », souligne-t-elle, pleine de satisfaction. Car la petite conserverie va bientôt changer d’échelle.
Il faut dire que l’idée des trois producteurs fondateurs a fait son chemin : depuis 2022, ce projet de conserverie est porté par l’Association ATC45 (Atelier de Transform’action Collectif du Loiret), association créée sous l’impulsion d’une dizaine d’acteurs de la chaîne alimentaire : producteurs, transformateurs, distributeurs, collectivités, mangeurs… « Cette conserverie, Bocaux des Champs, est le premier atelier collectif du Loiret, voire de la région Centre-Val de Loire, créé sous la forme de Scic, Société coopérative d’intérêt collectif », explique Marie-Pierre, justifiant par ailleurs l’absence d’atelier de transformation dans ce coin de campagne. Une aubaine pour cette jeune cuisinière, nouvellement conserveuse, par ailleurs docteur en économie, qui a souhaité professionnaliser sa passion. Et plus encore.
Marie-Pierre Hory est l’une des fondatrices de Bocaux des Champs à Férolles où elle cuisine soupes, plats préparés, tartinades, sauces, confitures… avec les fruits et légumes du terroir. Photo Estelle Boutheloup
33% de produits jetés avant d’être vendus
L’idée ? « Développer un outil qui réponde à la fois à un intérêt global et aux besoins de chacun, car le système alimentaire d’aujourd’hui n’est pas soutenable ni sur le plan environnemental – il faut des pratiques plus vertueuses qui préservent l’environnement et la santé – ni sur le plan social. » En effet, selon les chiffres de l’ADEME, 33% des produits de production sont jetés avant d’être vendus, soit l’équivalent de 16 milliards d’euros par an : « Pour des problèmes de calibrage ou de physique, de décalage entre l’offre et la demande avec parfois des pics de production qui ne sont pas maitrisables, notamment l’été quand les tomates poussent en pleine période de vacances. » Aussi, pour lutter contre ce gaspillage, la conserverie doit permettre de valoriser les surplus de production et les invendus, offrant ainsi la possibilité aux producteurs de « diversifier leurs débouchés, et aux consommateurs d’avoir une alimentation saine, de qualité, en circuit-court et accessible à tous, avec des prix justes pour que chacun puisse être rémunéré à sa juste valeur sans que le consommateur paie le prix fort en bout de chaîne. »
De 4 000 bocaux en deux ans, la petite conserverie changera d’échelle en septembre avec la production de la nouvelle conserverie municipale de Bou, dont la construction est financée par la commune elle-même. Photo Estelle Boutheloup
Une conserverie municipale unique à Bou
Distribués sur la métropole orléanaise dans des magasins bio, des fermes partenaires pour la vente directe et en AMAP, ces bocaux de 10 cl à 1L se vendent entre 2,40€ et 4,80€. Et si, pour l’heure, la production reste modeste, elle passera à 80 000 bocaux par an avec la nouvelle structure en cours de construction à Bou, près d’Orléans. « Un bâtiment de 110 m², construit dans le prolongement des services techniques municipaux, qui sera fonctionnel début septembre », explique Bruno Cœur, maire écologiste de la commune. L’aboutissement d’une réflexion amorcée il y a 4 ans poursuit l’édile : « Cette idée de transformation de fruits et légumes était dans notre programme électoral de 2020. Un contact a été pris avec le GABOR45, le Groupement des agriculteurs biologiques et biodynamistes de l’Orléanais et du Loiret, qui nous a mis en relation avec Marie-Pierre, déjà investie dans un projet de conserverie. »
Coût du projet ? Entre 600 000 et 700 000 €. La commune de Bou finance la construction – 140 000 € de reste à charge — 80% du coût total provenant des aides de la Région Centre-Val de Loire, du Département du Loiret, de la Métropole d’Orléans, mais aussi du Fonds de dotation Biocoop, des apports des associés et futurs sociétaires, d’emprunts bancaires et de France Active. Sans oublier le lancement d’une campagne de financement participatif au mois de mai. Cette conserverie, que dirigera Marie-Pierre, fonctionnera à différents niveaux : les producteurs pourront soit apporter leurs marchandises et les vendre en direct ; soit laisser leurs produits, les faire transformer sur place et récupérer ensuite leurs bocaux ; soit venir faire leurs propres bocaux grâce à un système de location d’équipements. Des ateliers de sensibilisation à l’attitude anti-gaspi, à l’alimentation durable et à la technique de conservation seront aussi proposés. « Chacun pourra être sociétaire quelle que soit la somme mise, l’idée étant d’être le plus collectif possible pour gagner la pérennité de la conserverie », souligne Bruno Cœur.
En attendant, Marie-Pierre lance déjà un avis de recherche d’un Service Civique pour une mission en lien avec la sensibilisation anti-gaspi et l’alimentation en contenu des réseaux sociaux et du site Internet. Poste à pourvoir au plus vite !
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